Dans son dernier ouvrage, l’écrivain algérien Amin Zaoui dénonce la censure et la répression dont sont victimes les intellectuels dans le monde arabo-musulman. Il analyse, dans cet essai maîtrisé et érudit, les sociétés arabes à la lumière de ce qu’il appelle » la culture du sang « .
» Depuis 1992, le nombre d’écrivains persécutés, emprisonnés, assassinés, exilés ou censurés a atteint un record : plus de trois mille. » L’écrivain algérien Amin Zaoui, qui a lui-même connu l’exil en tant qu’intellectuel, fait la somme macabre et triste des voix brisées du monde arabo-musulman. Son essai, La culture du sang, se penche sur la censure, née avec le premier appel du muezzin. » Le Coran, prose inimitable et parole de Dieu selon la nouvelle religion, mena une guerre contre la poésie et les poètes « , écrit-il. Suit l’énumération, à travers les siècles, au Maghreb et au Moyen-Orient, des persécutions diverses dont ont été victimes les écrivains et les poètes.
Amin Zaoui en arrive à la période contemporaine et traverse avec douleur la dernière décennie noire de l’Algérie qui a vu un nombre effrayant d’intellectuels tomber sous les balles des islamistes et s’affaisser sous leurs lames aiguisées. » En Algérie, c’est la catastrophe. Une civilisation de sang et en sang. Une agriculture de l’assassinat ! En Algérie, jour après jour, seuls les souffrances et les cimetières s’agrandissent. »
Feuilleton du sang et de la mort
L’auteur dissèque et analyse les sociétés arabes à la lumière de ce qu’il appelle » la culture du sang « . Des expressions qui empruntent au registre de l’hémoglobine, à la fête de l’Aïd qui » cultive dans l’imagination et dans l’imaginaire collectifs et individuels une sorte de culture de l’abattage où le plaisir du sang est au centre de la fête et du sacrifice « … Des » vampires de la virginité » (la fête du mariage ne commence qu’après l’apparition du sang) à l’excision… Amin Zaoui dresse le portrait des violences ordinaires et banalisées qui ont pu mener à » ce feuilleton du sang et de la mort, qui dure jusqu’à nos jours et qui a commencé par l’assassinat du président Mohamed Boudiaf, le 29 juin 1992, à Annaba « .
Essai sur et à propos de la censure, » réflexion personnelle sur les images, les comportements et les crimes des inquisiteurs contemporains du monde arabo-musulman « , ce livre est aussi un » hommage aux martyrs, aux femmes et aux hommes défenseurs de la démocratie, de la culture et de la beauté incarnant les grandes valeurs humaines « . Même si l’on peut regretter le côté » catalogue » que prend plusieurs fois l’ouvrage, il met à jour une réflexion originale et érudite qui mérite qu’on s’y attarde.
La Culture du sang, Fatwas, femmes, tabous et pouvoirs d’Amin Zaoui, éditions du Serpent à Plumes.
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