Algérie : les partis islamistes veulent s’emparer des mosquées


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Près de quinze ans après le succès du Front islamique du salut aux premières élections libres algériennes, les partis islamistes cherchent de nouveau à transformer les mosquées en réservoirs de militants. Les imams sont de plus en plus l’objet de menaces et d’agressions visant à les faire marcher au pas. Des violences dont les commanditaires sont difficiles à démasquer.

De notre partenaire El Watan

Les maisons de Dieu tombent subrepticement dans les rets des partis islamistes. Les partis de cette obédience, notamment le Mouvement de la société pour la paix (HMS, ex-Hamas), tentent lentement de faire main basse sur les mosquées qui sont, à leurs yeux, une tribune inespérée pour mener leurs campagnes et, à terme, prendre le pouvoir. C’est ce constat inquiétant qui est établi par un des cadres de ce secteur qui note la progression tentaculaire des ouailles de Bouguerra Soltani dans les comités de gestion de nombreuses mosquées du pays.

Leurs méthodes d’entrisme ? Intimidation des imams non acquis à leur cause, infiltration des associations religieuses des mosquées, menaces par lettres anonymes voire agressions physiques, comme cela a été le cas dans une mosquée à Skikda (500 Km à l’est d’Alger).

Au moins 20% des 15 000 mosquées concernées

Ces « recettes » ont été utilisées dans les quatre coins du pays. Le porte-parole du ministère des Affaires religieuses, M. Tamine, a confirmé hier qu’au moins 20% des 15 000 mosquées que compte le pays sont sujettes à ce genre de menaces et d’agressions. Et les imams sont souvent la cible toute désignée par les apôtres de « la religion partisane », pour reprendre l’expression de notre interlocuteur. Les chiffres sont effarants : au moins dix imams ont subi la lame pour la seule année 2005. Ces attentats commis parfois dans l’enceinte même de la mosquée et en présence des fidèles portent évidemment une signature. Nos sources révèlent que « la totalité » de ces actes portent la même estampille politique : HMS. Et pour se venger de l’imam intraitable, ces individus « encadrés de loin » n’hésitent pas à recourir à la manière forte pour faire plier ces derniers. « Si d’aventure l’imam refuse de faire passer leur message, ces gens l’agressent ou tentent de salir sa réputation auprès des fidèles en l’accusant de pédophilie ou d’incompétence. »

Voilà la méthode imparable pour avoir la « tête » d’un imam qui ne regarde pas dans le sens politique voulu. Et ces pratiques semblent se répandre dangereusement à travers tout le territoire national, y compris dans la capitale où la mosquée centrale de Birkhadem et celle de Bologhine sont régulièrement secouées par ces manœuvres visant leur imam, précisent nos sources. L’enjeu étant de s’assurer le contrôle de ces lieux de culte qui rassemblent des milliers de fidèles susceptibles d’être enrôlés. Quatorze millions d’Algériens assisteraient en moyenne à la prière du vendredi. Et connaissant l’importance de la fonction de l’imam, il est aisé de deviner l’appétit de partis de cette obédience pour un réservoir aussi puissant de potentiels militants politiques. Ce « travail de sape » des partis islamistes est évidemment bien connu des services de sécurité, comme nous le confirme le ministère.

Prendre le pouvoir en 2012

Mais en l’absence de preuves matérielles de leur implication, il est difficile de « débusquer les tireurs de ficelles ». Pour l’heure, les autorités religieuses se bornent à se constituer partie civile dans les plaintes déposées par les imams victimes d’agressions. Souvent, ajoute-t-on, ceux qui se rendent coupables d’agressions sur les imams n’ont pas forcément de filiation politique avec le parti. « Ces gens sont tout de même bien connus ; sous couvert d’associations religieuses, ils pratiquent le harcèlement sur les imams afin d’obtenir le contrôle d’une mosquée », affirme un cadre qui a requis l’anonymat. Plus inquiet encore, il est convaincu que « le HMS travaille à long terme pour prendre d’abord le ministère des Affaires religieuses puis, pourquoi pas, s’emparer du pouvoir ».

Il est vrai que Bouguerra Soltani avait affirmé dernièrement que son parti devrait prendre le pouvoir en… 2012. Officiellement, la loi interdit strictement la pratique politique dans les mosquées. « Il y a des lignes rouges à ne pas franchir ; dans les lieux de culte, seule la politique religieuse est tolérée parce qu’elle est rassembleuse, mais jamais la politique politicienne ! », tranche le représentant du département de Ghlamallah. Mais dans les faits, peut-on expurger les mosquées des luttes politiques ? La prolifération des agressions prouve plutôt que ces enceintes sont toujours sous contrôle politique. Pour cause, c’est là où se déroule la vraie bataille électorale aux insondables dividendes politiques.

Hassan Moali

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