A Sétif, dans l’Est algérien, les cybercafés foisonnent à un rythme effréné. Le nombre de ces espaces dépasse de loin la centaine. A tel point qu’on en trouve à chaque coin de rue. Education, courrier, amour… tout le monde a une bonne raison de surfer.
De notre partenaire El Watan
Des cybercafés en plein essor. La ville de Sétif, dans l’Est de l’Algérie en compte plus d’une centaine et, pour faire fructifier les affaires de ce créneau porteur, certains se sont installés à proximité des établissements scolaires et universitaires. Une installation qui a eu des incidences sur la scolarité et le cursus universitaire des nombreux habitués devenus accros du Net… Ces endroits sont-ils devenus des supports éducatifs ou des lieux d’engourdissement intellectuel ?
Pour les initiés, Internet est une fenêtre sur le monde extérieur, une bouffée d’oxygène, un trait d’union entre les peuples. Il est aussi un support pédagogique de premier ordre. D’autres, le considèrent comme l’une des plus importantes victoires de la science, ayant facilité le contact entre les gens de divers horizons, cultures et religions. D’ailleurs, de nombreux parents font de cette occupation un loisir partagé et accompagnent leurs enfants au cyber. « Le PC est un autre moyen pédagogique qui permet à ma fille de se documenter et d’enrichir ses connaissances », nous confie Mourad K. qui apprécie ces moments qui lui permettent, dit-il, d’approfondir ses liens avec son enfant.
Le meilleur des études
Le cyber attire dans sa spirale des milliers d’étudiants faisant du Net un support d’échanges culturels avec l’étranger car il offre des possibilités d’inscription aux grandes universités internationales et contient des sources inépuisables d’informations pour leurs thèses, mémoires et exposés. Le monde des affaires n’est pas en reste, des moyennes et petites entreprises de la région en font un espace de promotion. Ainsi, plusieurs sociétés ont pu vendre divers produits du secteur de l’artisanat en Europe.
L’incontournable tourbillon est d’une grande utilité pour les cadres à la recherche d’opportunités devant les aider à actualiser leurs connaissances. « L’Internet m’a permis de nouer des contacts et de tisser des amitiés avec des gens fabuleux qui m’ont aidé à décrocher un stage de perfectionnement de trois semaines dans un grand hôpital parisien », nous confie Djamel, infirmier, qui considère aussi le Net comme un moyen de décompression. « C’est aussi, dit-il, un accès sans visa à une planète où l’on obtient réponse à toutes sortes de questions. »
Menace psychique où boîte magique ?
Mme Djamila, qui est une fidèle de l’endroit, abonde dans le même sens : « Cette boîte magique réduit les distances et rapproche les gens. Elle me donne l’occasion de discuter avec mon fils qui se trouve au Canada. » Mme Malika H. n’est pas du même avis : « Le cyber est une menace pour le psychique des enfants ». Cette mère de famille, professeur de français, ne peut contenir son désarroi et son impuissance face à la dépendance de son fils. Agé de 13 ans, le garçonnet est devenu un accro du Net. Passionné de tchat et de jeux vidéo, il en est arrivé à sécher ses cours et à prendre de l’argent en cachette pour se rendre dans ces zones « proscrites » par ses parents.
L’accroissement du nombre de cybers à Sétif et dans sa région a engendré une féroce concurrence. Résultat : une guerre des prix qui oscillent à présent entre 20 et 50 DA de l’heure. Cette nouvelle donne n’a pas affecté le chiffre d’affaires des gérants qui répliquent : « Le cyber est avant tout un espace culturel. Il résorbe le déficit en livres qui ne sont ni disponibles ni à la portée de toutes les bourses. Il lutte à sa manière contre la délinquance juvénile. Ce lieu est un support didactique avéré pour les enfants scolarisés et n’est en aucune manière responsable des échecs scolaires. Les parents concernés doivent faire leur propre mea culpa avant de faire porter le chapeau à autrui. » Par ailleurs, les cybers sont confrontés au dilemme du contrôle, car les ordinateurs ne sont pas équipés de logiciels performants susceptibles d’empêcher l’accès à certains sites interdits (pornographiques). Pour combler ce déficit, les gérants qui surveillent de très près le surf de leurs internautes…
L’Internet de l’amour
Pour de nombreux adeptes, le cyber est un lieu de rencontre. Et Internet, un havre d’amour… comme l’atteste l’incroyable histoire du Sétifien Karim et de sa femme Houda, d’origine irakienne. « C’était une rencontre des plus étranges », nous confie notre interlocuteur qui enchaîne : « J’étais en train de tchater avec un groupe d’étudiants français, quand Houda s’est présentée comme étant une Irakienne poursuivant des études supérieures en France. On a vite sympathisé. Sa vision et sa philosophie de la vie m’ont épaté. Une année plus tard, on s’est retrouvés liés pour le meilleur… »
Le romanesque continue avec l’idylle de Ferras et Loubna, digne des contes des Mille et Une Nuits. Le beau Jordanien succombe au charme de sa bien-aimée qui raconte : « J’ai connu Ferras sur un site. Le courant est tellement bien passé entre nous qu’un jour il a débarqué sans prévenir à Sétif pour me voir. De notre mariage est née une petite fée qui a cimenté notre union… »
Melissa Ould Ali