Finalement, Alger aura eu raison de Paris qui entendait réviser les accords migratoires de 1968. En revanche, la France ne lâche rien en ce qui concerne le dossier malien.
Pari gagné pour Alger. La visite en Algérie du ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls, a mis un terme à quatre ans de polémique qui planait autour des accords d’immigration de 1968 relatifs à la circulation, à l’emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille. Le gouvernement de Nicolas Sarkozy avait pour ambition de revisiter ces accords, ce à quoi l’Algérie n’a eu cesse d’afficher, à chaque réunion bilatérale, un refus catégorique.
L’ancien président voulait imposer « à tous ceux qui veulent venir au titre du regroupement familial ou du mariage avec un Français l’obligation : 1. d’avoir un logement, 2. d’avoir un revenu, 3. d’apprendre le français et les valeurs de la République avant d’entrer sur le territoire national ». En fait, ces obligations figurent déjà dans l’article 4 de l’accord. L’objectif était surtout de diviser par deux les flux migratoires. D’après l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), les Algériens ont été les plus gros contingent d’étrangers à accéder au territoire français en 2010, avec 24 000 titres délivrés. Ils constituent la première communauté étrangère en France. Au total, les Algériens étaient 578 000 à détenir un titre de séjour en 2010, sans compter les binationaux.
Le gouvernement de François Hollande, lui, se résout à entériner un projet dont la finalité était perdue d’avance pour Paris. Manuel Valls a même proposé d’améliorer, sans suggestions concrètes, les conditions d’accueil et de circulation de certaines catégories de personnes, notamment les étudiants et les hommes d’affaires. Résultat, le comité de suivi, prévu par les accords de 1968, est de nouveau activé.
Oui à 1968, non à 2012
En revanche, à propos du conflit malien, la France reste intransigeante. Elle n’entend pas fléchir face à la demande de l’Algérie qui ne souhaite pas d’intervention militaire au Mali. A la différence de Paris, Alger souhaite privilégier le dialogue avec les groupes armés du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et d’Ansar Dine qui occupent le Nord du Mali. Seul point de convergence : aider le Mali à recouvrer son intégrité territoriale dans le cadre d’un dialogue avec les populations du Nord et lutter contre le terrorisme. « J’ai constaté une très grande convergence de vues sur la situation au Sahel […] sur le fait que ces dossiers là doivent être abordés avec beaucoup de lucidité en tenant compte des printemps arabes, ainsi que sur la volonté d’affirmer une relation très forte » entre les deux pays, a déclaré à la presse Manuel Valls à l’issue de sa visite.
La principale divergence intervient lorsque Alger souhaite discuter avec le groupe islamiste Ansar Dine alors que Paris, qui le considère comme un groupe terroriste au même titre qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mujao, préfère le combattre.
Le bras-de-fer s’annonce compliqué pour l’Algérie qui ne souhaite pas d’intervention militaire à ses portes (l’Algérie et le Mali ont une frontière commune d’un peu plus de 1 300 kilomètres, ndlr). La résolution 2071 déposée par la France à l’ONU, autorisant les autorités maliennes et ouest-africaines à fixer les modalités d’un déploiement militaire au Nord-Mali, a été adoptée. Désormais, le Mali et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) disposent de 45 jours pour présenter un dispositif armé opérationnel en vue d’une intervention militaire. L’ONU examinera alors ce dispositif avant de donner ou non son aval à une éventuelle intervention militaire au Mali.