Akon rêve grand, très grand pour son Sénégal natal. Le projet de construction Akon city, ville futuriste, cité de la démesure suit son cours. Même si des sceptiques continuent de douter.
Le 31 août 2020, le promoteur du méga-projet Akon City, le musicien sénégalo-américain, Akon, a procédé, en compagnie du ministre sénégalais du Tourisme et des Transports aériens, Alioune Sarr, à la pose de la première pierre de la ville qui poussera dans quelques années à Mbodiène, petit village situé sur les bords de l’océan Atlantique, à quelque 100 km de Dakar.
Un projet pharaonique
Avec un budget de 6 milliards de dollars, la réalisation du projet se déroulera en deux phases. La première, prévue pour débuter au cours du premier trimestre de l’année 2021, devra s’achever en 2023, et s’étendra sur 55 hectares. La deuxième phase se déroulera de 2024 à 2029, et couvrira les 500 hectares prévus pour accueillir la cité et toutes ses infrastructures. Parlant d’infrastructures, tout est prévu pour le confort total des futurs habitants de Akon City : une université, un stade multisport, des hôpitaux d’une capacité de 10 000 lits, des studios de cinéma, des centres d’affaires et de loisirs, etc.
Le tout sera fait sur la base d’une architecture de rêve, un parfait mariage entre l’ultra-modernité et la richesse culturelle africaine, qui devra donner naissance à des constructions aux formes peu ordinaires, même bizarres, pour reprendre les propres termes de Akon. « Je veux que l’architecture ressemble aux vraies sculptures africaines qu’ils font dans les villages. Les formes sont peut-être bizarres, mais au moins elles sont africaines », a-t-il laissé entendre.
Et pour réaliser ce projet de rêve, digne des cheikhs émiratis, un architecte, Hussein Bakri, qui sera appuyé par la société KE international.
Dans cette ville qui se veut écologique, une centrale solaire photovoltaïque sera la source d’énergie tandis que l’économie sera basée sur l’Akoin, une cryptomonnaie lancée en 2018.
Un financement bouclé au tiers
Le budget de construction de Akon City, estimé à 6 milliards de dollars (environ 3 304 milliards de F CFA), soit, à titre de comparaison, près de 80% du budget de l’Etat sénégalais qui, en 2020, s’élève à 7.6 milliards de dollars, est à la mesure du gigantisme du projet. A l’occasion de la conférence de presse tenue le jour de la pose de la première pierre du projet, le 31 août dernier, Akon a annoncé que le tiers du financement était déjà mobilisé. De quoi rassurer une frange de la population sénégalaise qui continue de voir dans ce méga-projet rien qu’une chimère.
De qui seront composés les 300 000 habitants prévus ?
A la finition prévue pour 2029, Akon City est appelée à accueillir quelque 300 000 habitants. La question qui vient immédiatement à l’esprit est de savoir qui sont ceux qui habiteront cette cité de rêve. Le Sénégalais lambda ? Beaucoup parmi eux en doutent. En témoignent ces propos tenus par certains Sénégalais et relayés par un organe de presse : « À l’heure où de nombreux quartiers de la capitale et d’autres villes de l’intérieur sont inondés suites à des pluies diluviennes, où se loger correctement est devenu un luxe, un tel projet est-il vraiment fait pour nous ? A-t-on besoin d’une ville ghetto réservée aux plus riches ? D’attirer les touristes en faisant fi de tout ce qui fait notre authenticité ? Nous avons besoin de maisons basses et aérées et d’espaces verts, de petites écoles qui ne sont pas inondées chaque année, nous avons besoin de bannir le béton et de confier à nos architectes le soin d’imaginer nos logements. Nous avons besoin de préserver nos plages et nos sites encore sauvages. Nous avons besoin de planifier nous-mêmes notre développement et pas de confier notre avenir aux rêves mégalomanes d’un rappeur américain ».
En tout cas, on sait pour l’instant que Akon vise, à travers ce projet, à attirer les Africains-Américains vers leurs racines africaines : « L’une de mes plus grandes motivations est que, quand je suis aux États-Unis, je rencontre beaucoup d’Africains-Américains qui ne comprennent pas vraiment leur culture. J’ai donc voulu construire une ville ou un projet comme celui-ci pour leur donner la motivation de venir voir d’où ils viennent », explique le chanteur.
Cercle d’habitants probables fermé ? Certainement pas. Ce qui est sûr, c’est que le promoteur de Akon City veut, à travers son projet, faire du Sénégal, la porte, le passage obligé du tourisme en Afrique : « Lorsque vous arrivez d’Amérique, d’Europe ou de n’importe quel pays de la diaspora, et que vous avez envie de visiter l’Afrique, nous voulons que le Sénégal soit votre première étape », a-t-il déclaré.