Après les aventures d’Aya de Yopougon, l’auteure ivoirienne de bandes-dessinées Marguerite Abouet replonge dans son enfance. Elle nous conte l’histoire d’Akissi, une petite fille malicieuse et intrépide. Attaque de chats, sorti le 3 juin, est le premier volume d’une série pour la jeunesse éditée par Gallimard, dans laquelle le lecteur, témoin des innombrables bêtises de la fillette, se laisse entrainer dans les rues d’Abidjan. Une BD piquante et attachante.
Marguerite Abouet, ambassadrice de la culture ivoirienne ? Cette auteure de bande dessinée, née en 1971 à Abidjan et installée en France depuis l’âge de 12 ans, en a l’étoffe. Après le prodigieux succès de sa première série, Aya de Yopougon, vendue à 350 000 exemplaires et récompensée du 1er prix au festival d’Angoulême en 2006, elle s’attaque à un autre pan de son histoire, son enfance. Les péripéties d’Aya, jeune ivoirienne de 19 ans, vivant dans un quartier chaud d’Abidjan, laissent place aux bêtises d’Akissi, petite fille pétillante et intrépide, à qui rien ne fait peur. Attaque de chats est le premier volume de cette nouvelle série jeunesse. Ces deux séries ont été écrites avec un seul but : montrer l’Afrique comme elle est réellement, loin des clichés dévalorisants de certains médias, et de la vision trop folklorique véhiculée par les contes et les légendes.
Afrik.com : Vous avez commencé par écrire des romans sans jamais oser les publier. Pourquoi vous êtes-vous tournée vers la bande-dessinée ?
Marguerite Abouet : En fait, je n’ai jamais vraiment écrit de romans. J’écrivais des choses que j’entendais dans la rue ou ailleurs, mais les textes que je produisais étaient pour moi. Je n’ai jamais eu la prétention d’être publiée et je n’ai même pas essayé. Je vivais dans une toute petite chambre de bonne. Ecrire était un moyen de ne pas sombrer. Pour ce qui est de la bande-dessinée, j’ai toujours raconté beaucoup d’histoires aux enfants que je gardais. Je leur racontais mon enfance à Yopougon et ça les faisait beaucoup rire ! Et c’est leurs parents qui m’ont dit un jour : « Mais pourquoi tu n’écris pas ? ». J’ai alors contacté Clément Oubrerie de Gallimard et lui ai montré mes textes. Il voyait très bien la petite fille et a voulu la dessiner. Lorsque Clément m’a montré quatre planches d’Akissi, j’ai beaucoup aimé et nous avons tout envoyé à Gallimard. Deux jours plus tard, Thierry Laroche, l’éditeur de Gallimard, nous a rappelés, mais il voulait quelque chose pour les plus grands et pas forcément pour les enfants. J’ai donc créé le personnage d’Aya qui a connu un beau succès. Mais c’est par Akissi que tout a commencé. C’était le projet initial.
Afrik.com : Y-a-t-il un lien entre Aya et Akissi ?
Marguerite Abouet : Ce n’est pas le même personnage mais plutôt une sorte de petite sœur. Dans Aya, on voit bien qu’elle a une petite sœur. Mais dans Akissi, la fillette a 7 ou 8 ans et sa grande sœur a seulement quatre ans de plus qu’elle. Ca ne peut pas être Aya. En fait elles se ressemblent, mais le seul lien qui les unit vraiment c’est Yopougon, le quartier dans lequel elles vivent.
Afrik.com : Qu’est ce qui vous a inspiré les mésaventures d’Akissi ?
Marguerite Abouet : Ce sont vraiment mes souvenirs d’enfance ! Contrairement à Aya où les personnages sont fictifs, ceux d’Akissi sont réels. Les bêtises qu’elle fait sont les miennes ! Mes pauvres parents ! J’étais assez connue dans mon quartier parce que je farfouillais partout, j’étais curieuse. Tout le monde me connaissait !
Afrik.com : Y-a-t-il une anecdote en particulier qui serait directement inspirée d’une de vos bêtises ?
Marguerite Abouet : Toutes ! Par exemple quand ils jouent au ballon et qu’ils l’envoient chez le bossu. Tout ça, c’est arrivé mais j’ai enlevé le côté « trash » ! En vrai, le bossu nous a montré sa bosse et nous a poursuivis jusque chez nos parents où on s’est vraiment fait gronder ! L’histoire des vers est vraie aussi ! Ce médicament qu’Akissi prend existait vraiment et c’était horrible. Il faisait sortir les vers partout ! On jouait aussi beaucoup à la maman. On ramassait des légumes qu’on pensait être bons mais qui étaient pourris et on s’occupait vraiment de tous les enfants du quartier. On les rendait malades en leur faisant manger ça.
Afrik.com : A qui s’adresse cette bande-dessinée ?
Marguerite Abouet : Akissi s’adresse aux enfants mais je pense que les adultes s’y retrouvent aussi. Surtout ceux qui ont connu la vie en Côte d’Ivoire et dans ce genre de quartier. Il y aura d’autres albums d’Akissi parce que j’ai fait beaucoup de bêtises !
Afrik.com : Avez-vous d’autres projets pour la suite ?
Marguerite Abouet : Bienvenue va sortir en septembre. C’est l’histoire d’une jeune blanche qui vit à Paris. Ce sera un mélange de plein de choses qui s’adressera plutôt aux adultes. J’aime beaucoup les histoires où il y a plein de monde, c’est pourquoi je n’écris pas d’histoires d’amour. La vie est toujours faite de nombreuses rencontres, d’amis et de familles. J’aime montrer ça dans mes histoires.