Le leader de l’opposition togolaise Yawovi Agboyibo, en prison depuis le mois d’août dernier, a été relâché jeudi soir. Les principaux partis d’opposition, qui avaient suspendu leur participation aux élections législatives à sa libération, se disent prêts à reprendre le dialogue avec le pouvoir.
Coup de théâtre jeudi soir au journal télévisé togolais. Lors d’un communiqué, le Général Eyadema annonce officiellement la libération de l’avocat Yawovi Agboyibo. Emprisonné depuis le 3 août dernier pour diffamation, puis pour association de malfaiteur, le leader du Comité d’Action pour le Renouveau (Car) était devenu le symbole de l’oppression politique. Jeudi encore, dans la journée, ses avocats déploraient les vices de procédure qui entachaient son jugement. Manque de preuves, reformulation de la plainte en cours de procès, chambre d’accusation réduite à un seul membre… la multiplication des dérives juridiques ne laissait pas augurer d’une issue aussi soudaine.
Liesse. A 21 heures, une délégation du Car se rend en toute hâte à la prison de Lomé. La précipitation fait suite à la surprise. La nouvelle se répand dans la ville comme une traînée de poudre. A son arrivée chez lui, Yawovi Agboyibo retrouve sa famille mais aussi des centaines de Togolais venus l’accueillir et le féliciter. Vendredi, la maison du prisonnier ne désemplit pas. Pour appuyer son geste, le pouvoir a délégué dès jeudi soir le ministre de l’Intérieur, le général Sizing Walla, serti d’un bataillon policier. Le message est clair : pour la présidence, la libération du plus célèbre avocat du Togo est une concession bienveillante aux caprices de l’opposition.
Explosion désamorcée
Henri Gbonné, membre du comité directeur du Car, se réjouit sans nuance de cette libération. Mais il remarque aussi que cette manoeuvre du pouvoir ne manque pas d’habileté. » Le Car est un parti non-violent. Mais ces temps ci, la population ne nous écoutait plus. Les gens nous disaient qu’ils en avait marre. On pouvait craindre une explosion « , confie ce dirigeant du premier parti d’opposition. Avec la libération d’Agboyibo, le dialogue politique peut reprendre, et l’espoir renaître.
Dès vendredi, le leader du Car annonçait sur l’antenne de RFI sa volonté de participer au processus électoral. » Si, dans les minutes qui suivent, on convoquait une réunion du comité paritaire de suivi, je m’y rendrais immédiatement « , a-t-il déclaré. Les élections législatives, ajournées le 8 mars dernier par la présidence, sont en effet suspendues au travail du comité. Les partis d’opposition ont jusqu’alors boycotté les réunions, requérant la libération du prisonnier et plus de transparence. Depuis hier soir, la tension qui auréolait le scrutin est donc un tant soit peu désamorcée. Jusqu’à quand ?
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