Afrique : La révolution tranquille par l’agriculture


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Un marché alimentaire de 1000 milliards de dollars s’offre au secteur de l’agro-business et aux petits exploitants africains qui vont relancer la croissance économique africaine en remplaçant les mines par l’alimentaire. C’est ce que pensent les auteurs d’un rapport sur l’état de l’agriculture en Afrique qui plaident pour une plus grande implication des gouvernements et du secteur privé. Ils estiment que bien pensé, le secteur agricole africain peut permettre à ce continent de passer du statut d’importateur à celui d’exportateurs de produits alimentaires, et en même temps nourrir les fils du continent.

L’Afrique fera sa révolution tranquille grâce à l’agriculture : c’est une des conclusions auxquelles sont parvenus les auteurs d’un « Rapport sur l’Etat de l’Agriculture en Afrique ». Ce rapport a été officiellement lancé ce 5 septembre 2017 à Abidjan, dans le cadre du Forum pour la Révolution Verte en Afrique (AGRF, 2017).

Le pouvoir des entrepreneurs et du libre-marché va porter la croissance économique de l’Afrique à partir de la production alimentaire, au moment où se présente au secteur une opportunité d’un marché alimentaire en progression rapide en Afrique.

Ce marché, estimé à plus de 1000 milliards de dollars d’ici l’an 2030, devrait remplacer les importations par des aliments à forte valeur produits en Afrique. C’est la principale conclusion du dernier rapport sur « Etat de l’Agriculture en Afrique » (AASR), lancé ce jour à l’occasion de l’édition 2017 du Forum pour une Révolution verte en Afrique (AGRF).

Selon le rapport, l’agriculture sera à l’origine de la révolution tranquille en Afrique, en mettant l’accent sur les PME et les petits agriculteurs, qui créent des emplois à forte productivité et une croissance économique durable, ce que les mines et la forte urbanisation n’ont pu réaliser jusque là.

Bien que 37 % de la population africaine vit actuellement dans les centres urbains, la plupart des emplois ont été créés dans des services moins rémunérés et moins productifs, plutôt que dans l’industrie, ce secteur des services représentant plus de la moitié du PIB du continent.

Les investissements intelligents dans le système alimentaire peuvent changer cette réalité de façon significative si une planification correcte est faite.

« L’Afrique a les ressources naturelles potentielles, les compétences, les capacités humaines et la terre susceptibles d’inverser la balance des paiements et de passer du statut d’importateur à celui d’exportateur en consommant des aliments produits en Afrique », a déclaré le Dr Agnes Kalibata, présidente de l’Alliance pour une Révolution Verte en Afrique (AGRA) à l’occasion du lancement du rapport.

Dr Kalibata, a salué ce rapport qui, a-t-elle souligné, « nous montre que l’agriculture impliquant une transformation inclusive, qui va au-delà de la ferme pour intégrer l’agro-business sera le chemin le plus sûr et le plus rapide pour l’Afrique si elle veut arriver à ce nouveau niveau de prospérité ».

Pour réussir, la révolution agricole africaine doit être très différente de celles observées ailleurs dans le monde. Cela nécessite une approche inclusive qui associe des millions de petites exploitations à des entreprises agroalimentaires, créant des chaînes d’approvisionnement alimentaires étendues et des possibilités d’emploi pour des millions de personnes, dont ceux qui vont opérer une transition dans l’agriculture. Cela est différent du modèle souvent vu ailleurs dans le monde où l’on est passé à une agriculture commerciale et de transformation alimentaire à grande échelle avec relativement peu d’emploi et des niveaux de capital élevé.

Le rapport souligne l’opportunité qui s’offre à l’Afrique de nourrir le continent avec des aliments produits en Afrique, ce qui répond à la demande croissante des populations urbaines riches dont le nombre est en augmentation sur le continent, qui sont à la recherche d’aliments transformés et pré-cuits de grande valeur.

En outre, il préconise que cette demande devra être satisfaite par bon nombre de petits agriculteurs qui sont sur le continent. Actuellement, une partie de cette demande alimentaire en hausse en Afrique est satisfaite par les importations. Celles-ci s’élèvent à 35 milliards de dollars par an, et devraient atteindre 110 milliards de dollars d’ici 2025, à moins que l’Afrique n’améliore la productivité et la compétitivité mondiale de ses secteurs agricoles et agro-industriels.

Le rapport reconnaît que, jusqu’ici, le secteur privé détient la clé de la transformation du système alimentaire.

«Les PME sont en train de contribuer de manière impressionnante à la valeur et à la création d’emplois dans la chaîne de valeur sous la forme d’un commerce agricole accru, de services agricoles, de transformation agricole, d’un commerce de détail urbain et de services alimentaires. Les grandes entreprises agroalimentaires, comme les entreprises qui démarrent, les agro-processeurs et les supermarchés, jouent également un rôle croissant dans la chaîne de valeur alimentaire dans de nombreuses régions », a déclaré Peter Hazell de l’IFPRI, qui a assuré la direction technique du rapport.

Cependant, l’étude est claire sur un fait : laissée aux seules mains du secteur privé, la croissance du système agroalimentaire ne sera pas aussi rapide qu’elle le pourrait, et ne profitera pas à autant de petits agriculteurs et de PME qu’elle aurait pu le faire. Le soutien des gouvernements est nécessaire pour stimuler et guider la transition. En tant que première priorité, les gouvernements doivent créer un environnement commercial favorable et, en particulier, atteindre les objectifs d’investissement de 10 % du PIB dans l’agriculture, convenu lors du Sommet de l’Union Africaine (UA) de 2003 dans le cadre du Programme Détaillé pour le Développement de l’Agriculture en Afrique (PDDAA).

Le rapport exhorte également les gouvernements à favoriser un secteur de production alimentaire compétitif à l’échelle mondiale par des mesures telles que l’augmentation des investissements dans les infrastructures, dans les cités et les villes secondaires, l’amélioration de la fiabilité de l’approvisionnement en énergie et en eau, la construction de plus grands espaces et la promotion d’un commerce régional ouvert, en identifiant et en investissant dans les cultures de premier ordre et introduisant des normes plus strictes en matière de sécurité et de qualité alimentaires.

Les auteurs demandent aussi aux gouvernements de stimuler de nouveaux partenariats publics privés pour des financements et des systèmes d’assurance plus innovants, pouvant entraîner une résilience accrue des agriculteurs et de leurs ménages. Alors que l’assurance agricole à l’échelle mondiale coûte 2 milliards de dollars, l’Afrique représente moins de 2 % de ce marché. D’autres mesures de relance budgétaire suggérées incluent l’amélioration de la réglementation financière, l’élaboration de meilleurs processus de déclaration de crédit, l’ouverture de zones économiques spéciales, le soutien à des systèmes d’entreposage numérisé et le partage des risques avec les prêteurs grâce à des garanties de crédit et des fonds de contrepartie.

Le rapport souligne d’autres nouvelles opportunités pour tirer profit de l’apport de la technologie numérique, comme le suivi par satellites et le « big-data ». Ceux-ci peuvent aider dans le repérage de nouvelles zones agro-économiques de grande valeur et des politiques de financement et de sécurité alimentaire plus intelligentes, en particulier face aux changements climatiques.

«La nature intelligente du soutien est aussi importante que son ampleur pour le groupe très diversifié de familles et d’agro-entreprises en Afrique. Pour intensifier leur contribution, les entreprises ont besoin d’une assistance adaptée à des groupes distincts de petites exploitations et agro-entreprises viables à différents stades de développement, en lieu et place d’un soutien sous forme de prêt-à-porter pour tous», a ajouté la présidente de l’AGRA, le docteur Kalibata.

Conclusion des auteurs du rapport : bien que des progrès aient été réalisés, l’Afrique doit faire beaucoup plus si elle veut entrer dans la compétition à l’échelle mondiale et au lieu d’exporter, se transformer en importateur, nourrissant ses populations avec des aliments produits en Afrique.

« Il est à espérer que le prix d’un marché en croissance rapide et précieux pour l’alimentation en Afrique suscitera une volonté politique généralisée et attirera les meilleurs talents commerciaux pour construire un secteur alimentaire de grande valeur », a déclaré Peter Hazell.

«Ce partenariat public privé sera essentiel pour assurer la trinité emploi à haute productivité, croissance économique durable et production alimentaire en Afrique pour l’Afrique et le reste du monde»

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