Afrique du Sud : un drame humain dans une mine abandonnée


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Des mines
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Les autorités sud-africaines ont confirmé la découverte de 36 corps de mineurs clandestins extraits d’une mine abandonnée située près de Stilfontein, à environ 150 kilomètres au sud-ouest de Johannesburg. Ce bilan tragique, révélé après deux jours d’opérations de secours, fait état de morts mais aussi de nombreux survivants qui, bien que sérieusement affaiblis, ont pu remonter à la surface. Un drame qui met en relief la précarité et les dangers auxquels sont confrontés les mineurs clandestins, appelés « zama zamas », dans le pays.

Les opérations de secours se sont intensifiées après qu’une lettre envoyée depuis le sous-sol a indiqué la présence de plus de 100 corps. Lundi, la police avait extrait neuf dépouilles et, le lendemain, 27 autres corps ont été remontés. Le nombre de victimes pourrait continuer à augmenter au fur et à mesure que les secours progressent dans les galeries de la mine. Les autorités locales estiment que plusieurs dizaines, voire plus d’une centaine de mineurs, pourraient avoir trouvé la mort dans ces galeries obscures, qui abritent encore une grande quantité de débris humains.

Ce genre de catastrophe est loin d’être un incident isolé en Afrique du Sud, où l’exploitation minière illégale, menée par des travailleurs souvent sans aucune sécurité, fait partie du quotidien de certaines régions. Le pays, qui abrite l’une des plus grandes réserves d’or au monde, est également le théâtre d’une économie souterraine florissante qui attire de nombreux migrants en quête de moyens de subsistance. Ces mineurs clandestins, principalement originaires d’autres pays africains, risquent leur vie chaque jour pour extraire de l’or dans des conditions de travail extrêmes.

Les « zama zamas » : des mineurs pris au piège de l’or

Le phénomène des « zama zamas » est bien connu en Afrique du Sud. Il désigne ces mineurs illégaux, souvent désespérés, qui s’aventurent dans les profondeurs de mines abandonnées pour y extraire de l’or. Le terme « zama zama », qui signifie « ceux qui essaient » en zoulou, illustre à la fois l’espoir et l’illusion d’un meilleur avenir, mais aussi la dangerosité de cette activité. Selon les autorités, environ 1 500 mineurs clandestins ont été secourus sur le site de Stilfontein, depuis août 2024, mais ce chiffre ne représente qu’une fraction de ceux qui continuent à opérer dans l’ombre.

La plupart de ces mineurs n’ont ni les compétences, ni l’équipement nécessaires pour travailler dans de telles conditions. Ils utilisent des outils rudimentaires pour extraire de l’or dans des galeries instables, où les risques d’effondrements sont omniprésents. Ces mineurs vivent souvent sous terre pendant des semaines, voire des mois, dans des conditions sanitaires précaires, sans accès à des soins médicaux ou à une alimentation suffisante. Le recours à des méthodes illégales pour acheminer de l’or vers le marché noir fait également partie des risques que ces travailleurs sont prêts à prendre pour survivre.

Les autorités et la réponse à cette tragédie

La situation à Stilfontein a conduit à une réponse des autorités sud-africaines, qui, depuis plus de deux mois, ont mis en place une opération de police visant à déloger les mineurs illégaux de la région. L’accès à la mine a été bloqué, et les autorités ont limité l’approvisionnement en nourriture et en eau apporté par les familles des travailleurs, dans une tentative de forcer ces derniers à sortir. Cette stratégie a été largement critiquée par les organisations de défense des droits de l’Homme et par les communautés locales, qui accusent les autorités de mener une politique brutale et inhumaine.

En novembre 2024, la ministre Khumbudzo Ntshavheni, responsable des affaires minières et de l’énergie, avait suscité l’indignation en déclarant : « Nous allons les enfumer et ils sortiront ». Ces propos, qui ont été interprétés comme une menace de recours à des méthodes de coercition violentes, ont exacerbé les tensions entre les autorités et les communautés locales. De nombreux observateurs estiment que cette situation est une illustration dramatique de l’échec des politiques publiques visant à protéger les travailleurs vulnérables tout en régulant l’exploitation des ressources minières.

Des précédents dramatiques en Afrique

Ce genre de tragédie n’est pas unique à l’Afrique du Sud. D’autres pays du continent, riches en ressources naturelles, ont également connu des incidents similaires liés à l’exploitation minière illégale. En République Démocratique du Congo, par exemple, des centaines de mineurs ont péri dans des effondrements de galeries minières clandestines. En Sierra Leone et en Guinée, les mineurs illégaux sont également confrontés à des conditions de travail similaires, souvent sans aucune protection ni mesure de sécurité.

L’exploitation minière illégale est un phénomène complexe qui résulte de facteurs économiques, sociaux et politiques. Les mines abandonnées, laissées sans surveillance par des entreprises minières, deviennent des terrains de prédilection pour les travailleurs précaires. Ces catastrophes révèlent non seulement la dangerosité de ces pratiques, mais aussi l’absence d’une réglementation adéquate pour protéger les mineurs et réguler ce secteur. En Afrique du Sud, malgré les efforts du gouvernement pour réguler l’industrie, le marché de l’or illégal reste florissant et de plus en plus de personnes continuent à prendre des risques pour survivre.

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Très attaché à l’Afrique Centrale que je suis avec une grande attention. L’Afrique Australe ne me laisse pas indifférent et j’y fais d’ailleurs quelques incursions
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