Plusieurs adolescents ont été amputés de leur pénis ou sont morts, dans la province sud-africaine du Cap Oriental, après des complications liées à leur circoncision rituelle. Ces drames se reproduisent chaque année, malgré les messages de prévention.
Ils ont voulu devenir des hommes, ils en ont perdu le plus précieux attribut. Plusieurs adolescents de la province sud-africaine du Cap Oriental (Sud) ont été conduits au Nelson Mandela Academic Hospital de Mthatha suite aux complications de leur circoncision rituelle, pratiquée par de soi-disant chirurgiens. « Actuellement, nous avons 26 jeunes admis. Malheureusement, trois ont dû être amputés et un jeune homme est mort le 27 juin », précise Luxolo Tyali, chargé des relations publiques dans l’établissement hospitalier. Les autres patients souffrent de septicémie et d’autres garçons sont décédés à cause de leur blessure.
Coûteux rituel
En Afrique du Sud, c’est la saison hivernale, période où les circoncisions rituelles sont fréquentes. Dans le Cap Oriental, la grande majorité des adolescents passe par cette étape pour « devenir des hommes » et la plupart préfère les écoles initiatiques aux hôpitaux, par respect de la tradition. Le problème est que ces écoles ne sont pas toujours réglementées, malgré la loi provinciale de 2001 qui interdit aux circonciseurs d’exercer sans autorisation de l’Etat et des parents.
« Des jeunes nous expliquent ainsi que ce sont des amis ou des personnes à peine majeures qui les ont circoncis », confie sous couvert d’anonymat une source de l’hôpital. « Des chirurgiens illégaux qui veulent se faire rapidement de l’argent se mettent à circoncire », ajoute Luxolo Tyali. Car le prix moyen d’une telle opération reviendrait à peu près à 500 rands (près de 53 euros). Juteux, si l’on considère que ces pseudo-opérations se font à la chaîne. On se souviendra pour exemple de ce « chirurgien » arrêté dans la semaine du 18 au 24 juin, qui a avoué à la police avoir réalisé quelque 200 circoncisions en deux semaines dans la région de Port St Johns.
Arrestations et peines dissuasives
Les conséquences de ces opérations, que certains médias n’hésitent pas à qualifier de « boucherie », peuvent être graves : hémorragies, amputations du gland, infections, gangrène, contraction du VIH/sida… Ceux qui échappent à la mort se retrouvent parfois avec un sexe passablement plus petit qu’avant l’opération. Qu’importe pour certains des garçons convalescents du Nelson Mandela Academic Hospital. « Ils sont fiers d’avoir fait l’opération. Ils se considèrent comme des hommes », commente notre source anonyme.
Tous ne vivent pas aussi bien cette expérience. Notre informatrice se souvient que, en 2004, un jeune patient désespéré s’est pendu en rentrant chez lui. La chirurgie réparatrice n’aurait-elle pas pu lui permettre de retrouver son pénis d’antan ? « Nous n’en sommes pas encore là », souligne Luxolo Tyali, assez amusé par la question. Le mieux semble donc d’éviter en amont que les garçons ne se retrouvent dans cette situation. Les autorités usent pour cela de la répression. Elles traquent les faux chirurgiens avec la complicité de la population et, depuis trois semaines, une vingtaine de personnes ont été arrêtées. Les peines sont dissuasives : les contrevenants encourent jusqu’à cinq ans de prison et, ces dernières années, plusieurs condamnations ont été prononcées.
Circoncision en cachette
Côté prévention, « le ministère provincial de la Santé a formé de nombreux circonciseurs, afin qu’ils prennent les mesures d’hygiène nécessaires pour éviter les complications. Ils sont les seuls à pouvoir légalement opérer dans la région », indique Luxolo Tyali. Le ministère provincial de la Santé et les medias ne ménagent par ailleurs pas leurs efforts pour sensibiliser la population aux risques encourus dans certaines écoles initiatiques.
« La position du ministère de la Santé est d’encourager le rituel de la circoncision, mais dans des conditions qui ne mettent pas en jeu la vie des garçons », poursuit Luxolo Tyali. Bon à savoir dans un contexte de promotion de la circoncision pour réduire la contraction du VIH/sida. Cependant, si le message touche des parents, des enfants restent sourds au danger et n’hésitent pas à voler de l’argent à leurs géniteurs pour se faire circoncire en cachette. Et devenir des hommes.