Mama Africa la bien nommée était ce week-end sur la scène parisienne de l’Olympia. Celle qui incarne depuis quarante ans la lutte contre l’Apartheid offrait au public français les musiques de son nouvel album « Homeland ».
« Merci aux enfants qui ont jeté des pierres contre les armes et les chars. Merci aux mères qui ont nourri la nation ». Sur la scène mythique de l’Olympia où elle se produit pour deux soirées, Miriam Makeba, la plus populaire des voix africaines, rend hommage à ses frères d’Afrique du Sud.
Vendredi soir, Zenzi, de son vrai prénom, retrouvait son public parisien. Du haut de ses soixante-huit ans, elle rayonne, étonnamment juvénile, invariablement géniale. Elle arrive sur scène avec l’air de celle qu’on n’attend pas. Elle est accompagnée de six musiciens nés – et notamment de l’excellent guitariste malgache qui fera un solo remarqué – et de trois choristes dont la jeune Zenzi (sa petite-fille !) Voix rauque et profonde, claquements de langues. Du jazz sud-africain envoûtant à une soul américaine moins réussie, de gospel en blues, c’est dans les morceaux traditionnels que Makeba semble se livrer le plus.
Elle mêle le répertoire de son dernier album « Homeland » à ses tubes de toujours. Le public exulte lorsqu’elle entame les premières notes de Malaika, musique traditionnelle tanzanienne, ou celles de « Pata Pata » écrite en 1956, qui la fit connaître dans le monde entier.
Charisme puisssant
Elle chante en zoulou, en xhosa et en américain. Elle chante pour son « Afrique troublée », pour parler « de là où ça coince », comme Madagascar, la grande oubliée des médias et des organisations internationales.
Pour ses prises de positions contre l’Apartheid, le régime afrikaner condamna Miriam Makeba à trente-deux ans d’exil, de 1960 à 1992. Et si elle continue dans ses chansons d’évoquer l’histoire sanglante de son pays – « Soweto Blues », qui rappelle les affrontements de 1976 – elle croit aux changements de la toute nouvelle Afrique du Sud. Elle râle avec sourire contre ceux qui continuent de taxer son pays de raciste. « Bien sûr qu’il y a encore du racisme en Afrique du Sud. Pourquoi n’y en aurait-il pas ? Il y en a dans des pays aussi anciens que les Etats-Unis où la France. Qu’on nous laisse le temps de nous lever. »
Charisme puissant, force aérienne, la grande dame repart comme elle est venue ; le public aussi, tout en se demandant comment elle fait pour donner tant, encore et toujours.