Quand l’économie est au ralenti, le réflexe est souvent de trouver un bouc émissaire : colonialisme, apartheid, impérialisme, etc. En Afrique du Sud pour répondre à un problème économique, le gouvernement a voté la « discrimination positive » pour les populations noires. Alors même que cette politique s’avère stérile en pratique, comme elle l’a été aux Etats-Unis jadis, le gouvernement insiste et persiste.
Dans son article, Temba A Nolutshungu, s’insurge contre l’acharnement du gouvernement Sud africain dans sa politique de discrimination positive. L’auteur affirme que malgré ses échecs évidents, cette politique est un moyen de mimer l’action tout en restant inerte face aux vrais problèmes économiques qui minent le pays. L’auteur fait alors une série de propositions accessibles et contextualisées.
Les problèmes socioéconomiques apparemment insolubles de l’Afrique du Sud sont une conséquence de la politique gouvernementale, qu’elle soit délibérée ou non. Aucun bouc émissaire, comme le colonialisme, l’impérialisme, l’apartheid, le secteur privé ou le concept maintenant discrédité du monopole blanc du capital, peut nier ce truisme. La faute, en fin de compte, incombe directement et exclusivement aux décideurs politiques, en particulier ceux qui sont dans l’arène parlementaire qui ont le dernier mot dans l’élaboration et le suivi de l’implémentation des politiques publiques, que le reste de la population, en particulier l’entreprise privée, doit suivre.
Une politique extrêmement dommageable sur le plan socioéconomique est la « discrimination positive » (Affirmative action), appelée de manière euphémique « autonomisation économique des Noirs en Afrique du Sud ». Pour les majorités noires les plus nécessiteuses et les plus exclues économiquement, elle ne permet pas intrinsèquement l’autonomisation et l’émancipation économique escomptées. Cette politique de « discrimination positive » en Afrique du Sud est un échec et pourtant le gouvernement s’y accroche. Pourquoi un tel entêtement ?
Si l’on prend l’exemple des Etats-Unis, en dépit de plus de 50 ans d’actions de « discrimination positive », mises en œuvre pour bénéficier à la frange noire de la population, les statistiques indiquent un défaut fondamental dans le concept lui-même.
Ce constat est évident quand on compare les revenus des ménages américains suivant leur origine ethnique. Selon le rapport de 2015 « Revenu et pauvreté aux Etats-Unis », Bernadette D Proctor, Jessica L Semega et Melissa A Kollar dressent le portrait suivant du revenu estimé des ménages américains par groupe ethnique :
Les Asiatiques : 74 382 $ (marge d’erreur 3470 $) ;
Les Blancs non hispaniques 60 325 $ (marge d’erreur 606 $) ;
Les Hispanique toutes catégories confondues : 42 540 $ (marge d’erreur 849 $) ;
Les Noirs 35 439 $ (marge d’erreur 759 $).
Si on regarde le groupe ayant le revenu le plus élevé, les Asiatiques, il faut souligner qu’aux États-Unis, aucune intervention de type « discrimination positive » n’a jamais été entreprise en leur faveur. La réussite économique des asiatiques est le produit de leurs propres initiatives et de leur travail acharné sans aide gouvernementale.
Il est de notoriété publique qu’en Afrique du Sud, comme dans tous les pays avec des programmes de « discrimination positive », l’expérience est uniformément négative. Il incombe moralement et économiquement aux décideurs politiques d’abandonner une telle mesure néfaste. L’abandon de la politique de « discrimination positive » réduirait drastiquement la fuite du capital intellectuel et financier chez les membres de la population qui sont inutilement aliénés par cette politique.
Les problèmes socio-économiques généraux qui frappent le pays se manifestent en termes de relations contractuelles, d’économie informelle, de niveaux de chômage supérieurs à 35% en incluant ceux qui ont abandonné la recherche de travail, et de mauvaise gestion de la plupart des entreprises publiques.
La solution à ces défis réside dans la compréhension de principes très fondamentaux de la nature humaine. Les gens sont motivés par la poursuite d’actions éclairées par leur intérêt personnel et répondant à leurs aspirations socio-économiques. Les entrepreneurs-propriétaires gagnent rarement un revenu personnel pendant un certain temps car ils se concentrent d’abord sur la survie et la croissance de leur entreprise pour réaliser ensuite des bénéfices récompensant les risques qu’ils prennent dans leur gestion.
Pour faire face aux défis socio-économiques que le pays doit relever, les principes spécifiques suivants devraient être suivis:
Le gouvernement doit mettre en œuvre des politiques qui entraîneront ou renforceront la liberté économique, c’est-à-dire la protection de la propriété privée, la liberté d’échange, la liberté de choisir et la libre concurrence. De même, le gouvernement doit abroger les politiques qui entravent ou compromettent la liberté économique des citoyens.
Flexibiliser le marché du travail afin d’autoriser de préférence les arrangements volontaires employeur-employé ou permettre aux chômeurs de longue durée de conclure des arrangements contractuels volontaires avec les employeurs sur une base qui leur soit acceptable.
Il existe toutefois des mesures spécifiques que le gouvernement peut mettre en œuvre sans violer les principes énoncés ci-dessus :
Comme le secteur des services financiers est la pierre angulaire de l’économie, le gouvernement doit s’abstenir d’interférer dans le bon fonctionnement de ce secteur, qui, au cours de ces dernières années, a fourni des services sophistiqués avec des produits innovants.
Le gouvernement devrait donner des parts du capital des entreprises publiques aux personnes démunies. Dans ce scénario, les bénéficiaires seraient identifiés sur une base stricte avec des critères objectifs.
Attribuer le foncier public superflu aux familles pauvres sur la base : une famille-une parcelle de terre, avec les infrastructures de base nécessaires.
Ces mesures politiques non idéologiques, compatibles avec la nature humaine et les principes économiques, sont très faciles à mettre en œuvre et répondent efficacement aux défis multidimensionnels que le pays doit relever. C’est une triste réalité, celle de la conduite des décideurs qui se limitent à défendre des intérêts étroitement privés, et se concentrent sur le court terme pour obtenir des votes au lieu d’adopter une approche à long terme tournée vers l’intérêt général. C’est bien le progrès économique qui guérira les discriminations plus que des décisions politiques.
Temba A Nolutshungu est analyste pour The Free Market Foundation.
Article publié en collaboration avec Libre Afrique.
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