Afrique du Sud : « Jacob Zuma est plutôt intéressé par sa réélection que par la situation du pays »


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Première puissance économique du continent africain, l’Afrique du Sud est aujourd’hui confrontée à des revendications sociales récurrentes qui gangrènent l’économie du pays et portent atteinte à sa réputation. Aujourd’hui, les protestations gagnent du terrain et semble dépasser le gouvernement actuel de Jacob Zuma.

En août 2012, l’Afrique du Sud revisitait l’un des moments les plus difficiles de sa jeune démocratie, née à l’aube de l’apartheid. Une grève déclenchée par des miniers et sévèrement réprimée dans le sang avait en effet suscité la colère et l’indignation dans le monde entier. Les grévistes de Marikana, un village situé dans la province Nord-Ouest de l’Afrique du Sud, protestaient depuis plus de six semaines réclamant une augmentation des salaires. Le mouvement avait été déclenché le 13 août lorsque trois mille foreurs de fond du complexe Lonmin de Marikana se lancèrent dans une grève interminable réclamant un salaire de base de 1.250 euros par mois, soit une augmentation de 200%.

La grève, qui visait à changer le statut économique de plusieurs d’entre eux qui disposaient de salaires très modestes, était un signal fort lancé au gouvernement actuel de Jacob Zuma pour un meilleur traitement de la classe ouvrière en Afrique du Sud, en l’occurrence les miniers. Elle était plutôt pacifique, jusqu’à la date du 16 août 2012 lorsque, débordés par l’ampleur de la situation qui prenait une nouvelle tournure politique, des policiers tirent à balles réelles dans la foule rassemblée sur les flancs de la colline pour exiger leurs droits. Ce fut le début d’une longue et très médiatisée confrontation entre la classe moyenne sud-africaine et le gouvernement de Jacob Zuma. Des critiques fusent de partout et l’on n’hésitait pas à demander que des enquêtes soient ouvertes afin de punir avec la dernière énergie les responsables.

Une victoire sur des charbons ardents

Quelques mois plus tard, suite à la tournure qu’avait pris la confrontation, les 28 000 mineurs grévistes du complexe Lonmin de Marikana finirent par obtenir gains de cause. A l’issue des négociations présidées par l’évêque anglican, Johannes Seoka, un accord, qui donnait une augmentation générale et immédiate de 11% à 22% des salaires, finit par être trouvé. L’Afrique du Sud pensait à travers cet accord tourner la page des revendications sociales qui gangrènent depuis longtemps le pays. Mais ce ne fut pas le cas. La fameuse grève de Marinaka, aujourd’hui plus connue sous le nom de « massacre de Marikana », n’est que l’arbre qui cache la forêt.

Les problèmes de la classe moyenne sud-africaine, notamment la classe ouvrière, est en réalité loin d’être résolus.
Aujourd’hui, le pays est encore replongé dans une spirale socio-économique. En effet, ce mercredi 10 janvier, de violents incidents ont, à nouveau, éclaté à De Doorns, dans la région du Cap. Cette fois-ci, c’est une autre classe ouvrière qui est entrée en lice : les ouvriers agricoles. Tout comme les miniers de Marikana, les quelques 3 000 ouvriers agricoles à De Doorns, à 100 km du Cap, dans une région productrice de vin, de fruits et de légumes, revendiquent aussi une augmentation de leurs salaires de 70 à 150 rands (6 euros à 13 euros). Le mouvement avait éclaté en novembre dernier avant d’être suspendu faisant deux morts dans des affrontements avec la police. Les nouvelles échauffourées qui ont été enclenchées hier n’ont pour l’heure fait aucune victime, mais le pays retient son souffle.

Une société minée d’inégalités

Actuellement, de nombreuses questions sont soulevées et certains voudraient avoir des explications concernant les fréquentes revendications sociales auxquelles est confronté le pays de Jacob Zuma, un pays considéré comme la plus riche du continent africain et membre à part entière du cercle très restreint des pays émergents.
Bernard Lugan, historien et spécialiste de l’Afrique, livre son analyse sur la situation actuelle que traverse la nation arc-en-ciel. Il souligne le mirage sud-africain et situe l’échec de l’ANC, le parti au pouvoir, dans trois domaines. Le chômage touche environ 40% des actifs et le revenu de la tranche la plus démunie de la population noire, soit plus de 40% des Sud-africains, est inférieur à près de 50% à celui qu’il était sur le régime blanc d’avant 1994. Le climat social est empoisonné par les criantes inégalités nourries par les « blacks diamonds » qui affichent avec insolence un luxe ostentatoire. Le pays est livré à la loi de la jungle et les crimes y sont fréquents. Et enfin, le mérite et la compétence n’y ont plus leur sens car ayant été remplacés par la préférence raciale ou communautaire.

Le même jugement est fait par Lucien Pambou. Joint par Afrik.com, le conseiller municipal UMP de la ville d’Alfortville et membre de plusieurs associations dénonce la mauvaise gestion du pouvoir par le gouvernement actuel. « L’ANC s’est juste contenté de vanter les mérites de Mandela, mais n’a rien fait pour améliorer la situation de la classe ouvrière Sud-africaine qui ne s’améliore pas du tout », déclare-t-il. Et de poursuivre : « le président Zuma est plutôt intéressé par sa réélection que par la situation actuelle de la société sud-africaine. Le pays fait parti des nations émergentes et il doit s’ouvrir aux nations émergentes en vue d’améliorer les conditions de vie des citoyens ».

En Mars 2011, le taux de chômage avait déjà atteint les 25% selon un chiffre officiel publié par l’office sud-africain. L’organisation de la dernière coupe du monde ainsi que celle de la prochaine coupe d’Afrique des nations témoignent encore que le pays reste une référence sur le plan économique au niveau du continent africain.
Néanmoins, les fréquentes revendications sociales et l’incapacité du gouvernement sud-africain à gérer la situation prouve qu’il y a encore des efforts énormes à fournir.

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