Omar Bongo Ondimba, dont la dépouille sera inhumée jeudi, était reconnu, même par ses détracteurs, comme un grand médiateur dans les conflits africains et de l’Afrique centrale en particulier. Qui lui succédera dans ce rôle de «sage»? De l’équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema, du camerounais Paul Barthélemy Biya et du congolais Denis Sassou Nguesso, qui dispose du «capital relationnel», de la ruse, et d’une connaissance des dossiers suffisante pour prendre la relève ?
«Omar Bongo n’est pas seulement le sage d’Afrique centrale. Il est le sage de toute l’Afrique, c’est notre doyen, notre baobab, autour duquel nous réglons tous nos problèmes. Il le faisait tellement bien, sans tambour et sans bruit… », a déclaré Idriss Deby Itno, le président tchadien, au lendemain de l’annonce du décès du président gabonais. La phrase en dit long sur le rôle clé que le défunt chef d’Etat exerçait sur le continent. Antoine Glaser, journaliste et fin connaisseur de l’Afrique, confirme : « Omar Bongo Ondimba, indique-t-il dans une interview accordée à France 24, jouait un rôle très important sur le continent. Il arbitrait tous les dossiers sensibles et intervenait dans tous les conflits majeurs ».
Au delà de sa succession à la tête du Gabon, c’est donc à la question de son remplacement dans le rôle de doyen des chefs d’Etats africains et de médiateur dans les conflits et autres dossiers brûlants, que pousse la disparition d’Omar Bongo. Son titre de doyen, de sage, Omar Bongo le devait, en partie, à sa longévité au pouvoir, 41 ans. Un record, après Fidel Castro, le leader de la révolution cubaine, qui passa 49 ans à la tête de son pays. Mais Omar Bongo Ondimba devait surtout ses talents de grand médiateur à ses multiples relations et sa parfaite connaissance des dossiers. Quel chef d’État africain dispose aujourd’hui d’autant de bagages que le défunt président gabonais ? En Afrique centrale, lorsqu’on survole la liste des chefs d’Etats inamovibles, deux figures se dégagent d’emblée : celle de l’équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema et de son homologue camerounais Paul Barthélemy Biya. A eux deux, ils cumulent plus d’un demi-siècle de pouvoir. Cinquante-sept exactement. Mais ont-ils, pour autant, le charisme et l’envergure nécessaires pour succéder au baobab d’Afrique centrale ? A en croire les analystes, non.
Denis Sassou Nguesso, le nouveau «sage» d’Afrique centrale?
Théodoro Obiang Nguema, 67 ans, qui fêtera les 30 ans de son accession au pouvoir en août prochain, est certes a la tête d’un pays immensément riche qu’il dirige d’une main de fer, mais il est loin d’avoir la même influence qu’Omar Bongo auprès de ses collègues africains. A propos de Paul Barthélemy Biya qui, lui, totalise 27 ans de pouvoir, Jeune Afrique écrivait en avril dernier qu’il a « une connaissance intime de son pays et de sa classe politique, qui lui permet de fonctionner en pilotage automatique. » Mais cet atout suffit-t-il pour jouer le rôle de sage et de médiateur dans la sous-région? Que nenni! Comme le premier, l’aura du président camerounais ne rayonne pas à l’extérieur. A 76 ans, Paul Barthélemy Biya est assez effacé sur le plan international.
« On ne peut jamais remplacer un homme par un autre », dixit Idriss Déby dans l’interview qu’il a accordée à RFI au lendemain de la mort d’Omar Bongo. Certes. Mais il apparaît évident que ni Paul Barthélémy Biya, ni Teodoro Obiang Nguema n’ont la carrure suffisante pour influer dans le règlement de conflits en Afrique et de dossiers sensibles. Qui donc pourrait revêtir le costume laissé par celui qui était considéré, à lui seul, comme un pan de l’histoire africaine ?
«Personne parmi les chefs d’État du continent ne dispose, en 2009, de son Omar Bongo, Ndlr] capital relationnel, son astuce et de ses connaissances », a indiqué à La Croix, l’historien Elikia M’Bokolo, auteur de Médiations africaines. Mais en Afrique centrale, le président congolais, Denis Sassou Nguesso semble être la personne la plus à même de jouer le rôle d’Omar Bongo. Au total, il a passé 25 ans au pouvoir et, sauf surprise, devrait remporter la prochaine présidentielle de juillet à laquelle [il vient d’annoncer sa candidature. Sassou Nguesso est considéré comme un autre pilier de la Françafrique, après le doyen Omar Bongo. Même si l’Elysée le nie, la récente visite de Nicolas Sarkozy à Brazzaville est une preuve de soutien à celui dont on dit qu’il a ramené et maintenu la paix et la stabilité dans son pays. Un pays où les intérêts français sont presqu’aussi nombreux qu’au Gabon.
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