Africom, le commandement régional américain pour l’Afrique, est devenu pleinement opérationnel au mois d’octobre. Le porte-parole du commandement militaire Eric S. Elliott revient sur les missions stratégiques de cette présence plus affirmée des Américains en Afrique.
La mise en place du Commandement des États-Unis pour l’Afrique (Africom) a été annoncée en février 2007. Le projet aura mis environ une dizaine d’années à voir le jour. L’installation d’Africom a coûté 50 millions de dollars américains, et son budget a été fixé à 75, 5 millions de dollars pour l’année fiscale s’étendant du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2008.
Afrik.com : Pourquoi un commandement régional africain ?
Eric S. Elliott : Il y avait déjà un commandement militaire africain mais il était réparti au sein des trois autres commandements régionaux américains, à savoir du Commandement pour l’Europe (EUCOM, basé à Stuttgart, ndlr), du Commandement central (CENTCOM, basé en Floride, ndlr) et du Commandement Pacifique (PACIFICCOM, basé à Hawaï, ndlr). Mais aujourd’hui, nous disposons d’un commandement unique qui fait de la région Afrique, soit 53 pays, une véritable priorité, contrairement à la situation que nous connaissions auparavant. Tous les pays africains qui dépendaient des autres commandements régionaux, de même que ceux regroupés au sein du Commandement du centre (l’Afghanistan, l’Irak, l’Egypte, le Soudan, la Somalie et le Kenya, ndlr), tous sauf l’Egypte, seront transférés d’ici le 30 septembre 2008 sous l’autorité d’Africom.
Afrik.com : Quel est l’organigramme d’Africom ?
Eric S. Elliott : Africom est sous le commandement du général William E.Ward. Ses deux adjoints sont l’amiral Robert T. Moeller, commandant adjoint pour les opérations militaires et l’ambassadeur Mary Carlin Yates, commandant adjoint pour les activités civilo-militaires.
Afrik.com : Africom est actuellement abrité par le siège de votre commandement européen à Stuttgart en Allemagne. Vous ne semblez pas être le bienvenu sur le continent, notamment auprès des pays que vous avez approchés, la Libye et l’Afrique du Sud. De même, vous avez aussi récemment démenti que la Mauritanie avait été choisie…
Eric S. Elliott : Nous sommes toujours en consultation avec les pays africains. Par ailleurs, Stuttgart s’est imposé comme siège temporaire parce que le commandement européen s’occupait jusqu’ici de la majorité de nos opérations militaires en Afrique.
Afrik.com : Que va devenir le camp Lemonier à Djibouti ? Sera-t-il attaché au nouveau commandement régional africain ?
Eric S. Elliott : L’organisation d’Africom commence juste à se mettre en place. Le sort qui sera réservé à notre base djiboutienne n’a pas encore été décidé.
Afrik.com : Quelles sont les missions stratégiques dévolues à Africom ?
Eric S. Elliott : L’Afrique est devenue un continent stratégique, c’est le deuxième le plus peuplé de la planète. C’est un continent qui échange de plus en plus avec les Etats-Unis, notamment ses ressources naturelles, et nous souhaitons lui apporter notre aide face aux problèmes de développement qui sont les siens. Africom répondra ainsi aux besoins humanitaires des pays africains en termes de logistique. Par exemple, quand il a fallu rapatrier en 2005 les prisonniers marocains détenus en Algérie par le Front Polisario, nous avons apporté notre appui militaire. L’autre mission de ce commandement régional africain est d’aider les pays africains à améliorer et à mieux assurer leur sécurité à travers, entre autres, la formation. Africom collaborera par ailleurs étroitement avec l’Union africaine.
Afrik.com : Africom sera aussi le moyen de préserver les approvisionnements américains en pétrole et de mener la lutte contre le terrorisme en Afrique…
Eric S. Elliott : En matière de lutte contre le terrorisme, nous avons déjà le camp Lemonier dont vous parliez tantôt. Africom devrait plutôt avoir des missions qui contribueront à aider les pays africains à lutter contre le terrorisme. Quant au pétrole, il s’agit surtout d’en garantir et de protéger le libre accès dans le monde entier, et plus particulièrement en Afrique. Africom souhaite aider les pays africains à défendre leurs intérêts, celui d’exporter notamment leur pétrole. Notre but est d’aider les pays africains à être plus indépendants en termes de sécurité, avec ou sans pétrole. Notre aide n’est pas conditionnée.
Afrik.com : Que représente Africom dans l’arsenal militaire américain à l’étranger ?
Eric S. Elliott : Africom, qui comptera environ 1000 hommes, représente une goutte d’eau comparé aux près de 27 000 soldats américains basés, par exemple, en Corée du Sud.
Afrik.com : Dans ces conditions, comment parviendrez-vous à assurer toutes vos opérations ?
Eric S. Elliott : Nous ferons appel, quand cela sera nécessaire aux autres commandements régionaux américains dans le monde.