Affaire des cinq Nigériens arrêtés au Bénin : trois placés sous mandat de dépôt et deux libérés


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Un oléoduc
Un oléoduc

Trois des cinq Nigériens arrêtés le 5 juin 2024 sur la station terminale du pipeline Niger-Bénin à Sèmè-Kpoji ont été déposés en prison, ce jeudi, en attendant leur jugement, lundi prochain. Les deux autres sont libres.

Les cinq Nigériens interpellés sur la plateforme terminale du pipeline Niger-Bénin à Sèmè-Kpodji, le mercredi 5 juin 2024, ont été présentés, ce jeudi au procureur spécial près la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET). Initialement placés en garde à vue à la brigade criminelle, les cinq citoyens nigériens ont été conduits dans les locaux de la CRIET ce jeudi matin. Il s’agit de Aminou Hadiza Ibra, directrice générale adjointe de WAPCO Niger ; Ismaël Cissé Ibrahim, inspecteur pétrolier ; Mousbahou Dankané, inspecteur pétrolier ; Seydou Harouna Oumarou, ingénieur pétrolier, cadre de WAPCO Niger ; et Abdoul Razak Djibo, ingénieur pétrolier, cadre de WAPCO Niger.

À l’issue de leur audition, trois parmi les interpellés ont été placés sous mandat de dépôt et seront jugés à partir du lundi prochain. Les personnes déposées en prison sont : la directrice générale adjointe de Wapco Niger et les deux agents à qui il était reproché d’avoir arboré de faux badges. Les deux autres ont été libérés.

Jusqu’où ira le bras de fer entre les deux pays ?

Avec ce nouvel acte, il est légitime de se demander jusqu’où ira le bras de fer entre le Bénin et le Niger ? Doit-on craindre que.la situation ne dégénère ? C’est peut-être le moment pour les médiateurs potentiels d’entrer en lice pour faire éviter le pire aux deux pays voisins. Lundi dernier, l’ancien Président béninois, Boni Yayi, s’est rendu au domicile de son homologue Nicéphore Soglo. Les deux hommes ont discuté de la crise bénino-nigérienne, mais sans faire de déclaration à la presse.

Les relations se sont détériorées entre les deux pays au lendemain du coup d’État ayant renversé le Président Mohamed Bazoum. En effet, le Bénin, comme la plupart des pays de la sous-région, s’est conformé aux sanctions imposées par la CEDEAO en gardant ses frontières avec le Niger fermées. Fin févier 2024, la CEDEAO a levé les sanctions. Le Bénin, dont le Président militait quelques semaines plus tôt pour la levée des sanctions, s’est empressé de rouvrir ses frontières. Ce que ne fit pas le Niger.

L’escalade

Lundi 6 mai 2024, Patrice Talon décide de mettre un blocus sur le pétrole brut nigérien qui devait transiter par le Bénin via un oléoduc de près de 2 000 km avant d’être exporté. Des négociations sont faites, notamment à l’initiative du partenaire chinois qui est le maître d’œuvre dans l’exploitation du pétrole nigérien. Patrice Talon autorise à nouveau le passage du pétrole, malgré le refus du général Tiani de recevoir son envoyé spécial, le ministre béninois des Mines, Sam Adambi, qui s’est rendu à Niamey muni d’une lettre adressée par le Président béninois à son homologue nigérien. Entre-temps, le Niger a tenté de justifier le maintien de ses frontières fermées par une supposée présence au Bénin de bases militaires françaises chargées de former des terroristes ayant reçu la mission de le déstabiliser.

Dans ce sens, les autorités nigériennes ont clairement accusé le Bénin d’avoir été le point de départ des terroristes qui ont frappé la base militaire de Boni, le 20 mai 2024. Pendant que les deux dirigeants se regardaient en chiens de faïence, intervint, le 5 juin, l’interpellation de cinq Nigériens accusés de s’être frauduleusement introduits sur le terminal de Sèmè-Kpodji. De la déclaration de presse faite par le procureur, le lendemain, il ressort que l’enquête ouverte a « formellement établi qu’au moins deux parmi ces personnes sont des agents nigériens au service du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) ».

Et d’ajouter que ces deux personnes « se sont fait confectionner pour la circonstance de faux badges d’employés de WAPCO Niger ». L’urgence à l’heure actuelle est de parvenir à « déterminer les motivations réelles des mis en cause dans un contexte où des informations récurrentes font état de la planification d’actes d’atteinte à la sûreté de l’État du Bénin », avait encore déclaré le procureur spécial près la CRIET.

Le 8 juin, c’est le CNSP qui se fend d’un communiqué pour dénoncer un kidnapping et une prise en otage de ses citoyens qu’il promet de faire libérer sans condition par tous les moyens.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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