AES : le Mali, le Burkina Faso et le Niger reprennent le contrôle de leurs ressources minières


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Déterminés à mettre fin à la domination des multinationales, le Mali, le Burkina Faso et le Niger – réunis au sein de l’Alliance des États du Sahel – reprennent le contrôle de leurs ressources minières. Un bras de fer s’engage avec les géants de l’or et de l’uranium, dans un contexte de réforme fiscale et de souveraineté économique affirmée.

Dans un contexte de forte demande mondiale pour les ressources naturelles, les pays du Sahel, à travers l’Alliance des États du Sahel (AES), ont décidé de prendre le contrôle de leurs ressources minières. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, en particulier, ont commencé à mener une bataille acharnée contre les géants miniers internationaux pour obtenir une part plus juste des revenus générés par l’exploitation de leurs terres. Cette décision s’inscrit dans une volonté plus large de rééquilibrer les relations économiques avec les multinationales, qui, jusqu’à présent, ont largement bénéficié de l’exploitation des richesses naturelles de la région.

Une reconquête des ressources naturelles

La volonté des trois pays de l’AES de reprendre en main leur secteur minier ne relève pas seulement de l’opportunisme, mais d’une réelle nécessité économique. Ces pays, riches en minerais comme l’or au Mali ou l’uranium au Niger, ont longtemps vu leurs ressources exploitées par des entreprises étrangères sans en tirer une part significative des bénéfices. À titre d’exemple, la mine de Loulo-Gounkoto, l’une des plus grandes mines d’or au monde, est exploitée à 80% par la société canadienne Barrick Gold, mais seulement 20% de la production revient à l’État malien, malgré l’importance de ce complexe minier dans les exportations d’or du pays. Cette situation a poussé les gouvernements de la région à mettre en place des réformes visant à capturer une plus grande part de la rente minière.

Le dernier épisode en date de ce bras de fer est survenu au Mali, où le groupe Barrick Gold a suspendu ses opérations sur le site de Loulo-Gounkoto après que le gouvernement malien ait ordonné la saisie du stock d’or. Une décision qui a relancé les tensions entre les États africains et les sociétés minières. Cette mesure fait écho à celles prises par le Niger et le Burkina Faso, qui ont également réagi en retirant des permis d’exploitation à des entreprises étrangères. Au Niger, le gouvernement a retiré le permis d’exploitation de mines d’uranium au groupe français Orano, tandis qu’au Burkina Faso, la junte a annulé la licence d’exploitation d’une mine d’or à la société australienne Sarama. Ces actions illustrent la détermination des pays de l’AES à ne plus se contenter de miettes.

Des réformes fiscales pour capter une plus grande part des bénéfices

Pour compléter leur stratégie, ces pays ont réformé leur législation minière. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont ainsi renforcé leurs codes miniers afin d’obtenir jusqu’à 50% des revenus générés par l’exploitation minière. Ces réformes sont destinées à garantir que les États africains perçoivent une part plus équitable des bénéfices, notamment en augmentant les taxes sur les entreprises minières et en imposant des redevances sur le chiffre d’affaires des exploitations. Ces efforts visent à corriger un déséquilibre qui existait depuis des années, où les sociétés minières profitaient de faibles taxes et de conditions avantageuses pour l’exploitation des ressources locales.

Cependant, cette volonté de rééquilibrer la répartition des revenus miniers n’est pas sans difficultés. Bien que les nouvelles règles fiscales s’appliquent aux projets miniers futurs, les pays doivent renégocier les contrats existants avec les sociétés multinationales, un processus souvent long et complexe. Les négociations sont fréquemment sources de conflits, comme en témoignent les procédures d’arbitrage international annoncées par certaines sociétés minières après la suspension de leurs opérations. De plus, même avec des législations renforcées, des défis demeurent, notamment en matière d’optimisation fiscale et d’évasion fiscale pratiquées par certaines entreprises, ce qui limite la capacité des États à capter l’intégralité de la rente minière.

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