Achoura, Le Sénégal a fêté le couscous à travers la Tamkharit


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Des enfants célèbrent Achoura

Les Sénégalais ont célébré, dans la nuit du mardi 16 juillet 2024, la Tamkharit, encore appelée Achoura. Une fête du couscous qui a été vécue par toute la population, dans son entièreté. Les mets, les uns plus succulents que les autres, ont été partagés, mais aussi il y a eu des séances de chant, de danse sous forme de petits carnavals.

Un mois après la Tabaski, communément appelée Aïd el-Adha ou fête du mouton, place est faite à la célébration atour du couscous. La Tamkharit ou Achoura a été grandement célébrée dans ce pays d’Afrique de l’Ouest. Les jours d’avant, les marchés ne désemplissaient pas. Jusqu’après minuit, les commerces étaient bondés, histoire de bien préparer la fête. Viande, boyaux de mouton, de chèvres ou de bœufs, légumes et autres condiments étaient au centre des emplettes.

Tamkharit ou Achoura, une fête autour du couscous

Certains, par contre, ont pris le soin de garder dans la chambre froide une partie du mouton de la Tabaski, pour agrémenter la sauce du jour. Alors que d’autres, outre la viande de l’Aïd el-Adha, ont aussi conservé les pattes de leur mouton qui serviront dans la préparation. Aucun détail n’est négligé pour rendre la fête belle. Et rien, absolument rien, n’est de trop. « Une fête particulière qui se célèbre de façon particulière », nous répètent tous nos interlocuteurs.

« Cette année, le prix des légumes est abordable, contrairement aux années précédentes où on avait noté de grosses spéculations. Je pense que c’est à la faveur du nouveau régime qui est en train de démener pour éviter les hausses anormales des prix des denrées auxquelles nous ont habitués les commerçants. Et je trouve que c’est une bonne chose. En tout cas, la fête a été bien préparée dans son ensemble », déclare Oumou Kane, ménagère.

« Cela joue beaucoup sur la cohésion sociale, le vivre ensemble »

Après une journée de préparation, le repas, prévu pour le dîner, est servi dès 18 heures pour certains. Notamment, ceux qui veulent partager leur repas avec une connaissance qui habite loin, ou un voisin d’une autre confession religieuse. Autant durant la fête de Pâques ou Noël, les chrétiens partagent leur « pain » avec les musulmans, autant durant les fêtes musulmanes, c’est le retour de l’ascenseur. Une obligation dans ce pays composé de plus de 95% de musulmans.

« Je dois servir à manger à ma belle-famille, à mes amis catholiques, à quelques connaissances. C’est une habitude que j’ai héritée de mes parents, qui l’ont héritée des leurs. Ici au Sénégal, c’est une tradition de partage. Ce qui fait notre particularité. Et je crois que cela joue beaucoup sur la cohésion sociale, le vivre ensemble. Et bien entendu la paix dans les cœurs. Nous aïeux nous ont légué de très bonnes choses qui nous renforcent jusqu’à présent », confie Ramata Sow, vendeuse, sourire au coin.

Une tradition de plus en plus délaissée par les populations

Si le repas est servi très tôt, il sera dégusté à la tombée de la nuit, autour d’un grand plat. Le couscous de la Tamkharit se mangeant en famille. « Après le dîner, la tradition veut que le peu qui reste dans le plat soit renversé au sol. Ah oui ! Il est impératif qu’il reste un peu de couscous. Car, s’il n’en reste pas, cela veut dire que certains membres ne sont pas rassasiés, ce qui est synonyme de pécher. Car, ce jour, particulièrement, aucune Sénégalais ne doit dormir affamé », relève Abdou Diop, islamologue.

« Et accroupi devant ce plat renversé, chaque membre de la famille viendra, à tour de rôle, formuler des prières en direction de l’année à venir. C’est une tradition, mais qui est de plus en plus délaissée par les populations. De nos jours, les gens ont plus tendance à fonctionner en individualité. On voit des familles où chacun se sert juste de ce dont il a besoin dans son plat pour s’isoler et manger. Ce qui enlève un peu de tradition à cette fête musulmane », poursuit le religieux.

Des chants et des danses contre des billets de banque

Après le dîner puis les rituelles autour du repas, les festivités peuvent commencer. Un véritable carnaval. La plupart du temps, les garçons se déguisent en filles et vice-versa. Les hommes se déguisent en femmes et vice-versa. Souvent maquillés et munis de le tam-tam de fortune, parfois des ustensiles de cuisine, ils parcourent les maisons, chantant et dansant avec le plus d’humour possible. Leurs hôtes n’hésitent pas à leur filer un billet de banque ou quelques pièces, si ce n’est pas une quantité de riz.

L’Achoura 2024 n’a pas dérogé à la règle. Dans un quartier comme les Parcelles Assainies de Thiès, les enfants comme les adultes ont célébré la fête du couscous sous le rythme des casseroles, des pots de conserves mais aussi des bongos et des tam-tams. Des rythmes endiablés qui ont ponctué cette soirée festive durant laquelle l’ange risque de rentrer bredouille; puisqu’il ne verra pas une seule personne ne faisant pas son poids normal, du fait de la faim. Car dit-on, ce soir particulièrement, Dieu envoie un ange vérifier si tout le monde a bien mangé !

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Journaliste pluridisciplinaire, je suis passionné de l’information en lien avec l’Afrique. D’où mon attachement à Afrik.com, premier site panafricain d’information en ligne
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