Abdoulaye Wade instaure le ticket présidentiel


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À la demande du chef de l’Etat sénégalais, un projet de loi constitutionnelle instituant « le ticket de l’élection simultanée au suffrage universel du président et du vice-président de la République » a été adopté hier en conseil des ministres. Le Sénégal se dirige donc vers une élection « à l’Américaine ».

À huit mois de l’élection présidentielle de 2012, Abdoulaye Wade change la donne et dégaine le ticket présidentiel. Une annonce surprise. En effet, le poste de vice-président de la République a été créé dès juillet 2009 au Sénégal suite à une révision de la constitution. Mais depuis, le poste n’a jamais trouvé preneur et l’idée dormait dans les tiroirs au point de faire croire qu’Abdoulaye Wade avait renoncé à ce projet. Le vice-président devait être nommé par le président et la durée de son mandat ne pouvait dépasser celui du président, qui pouvait mettre fin à ces fonctions. Deux ans après, c’est une vice-présidence dépoussiérée qui refait surface puisque cette fois, le vice-président est élu par le peuple et, en cas de décès ou d’empêchement, il remplace le président.

La nouvelle fait bien évidemment les choux gras de la presse. Pour le quotidien Walfadjri, l’intention du secrétaire général du Parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir) ne fait aucun doute. Dans sa manchette, le journal explique que « Wade restaure le dauphinat ». Pour Sud Quotidien, « Wade cherche une roue de secours ». « Si Abdoulaye Wade parvenait à s’allier à une personnalité capable à elle seule de faire un bon résultat, ses chances resteraient intactes au soir du 26 février prochain », écrit le chroniqueur du journal. « À chaque fois qu’il est confronté à des difficultés électorales, poursuit le quotidien Kotch, il a pensé à cette formule, comme un handicapé peut être tenté de prendre sa béquille. » Si dans les médias étrangers, Wade se veut sûr de lui et prétend être « le seul président en perpétuel état de grâce », il sait son régime menacé dans les urnes en 2012. Récemment, un sondage le donne même éliminé dès le premier tour avec seulement 17% des voix et devancé par le candidat de Bennoo et Macky Sall.

Quel colistier pour Abdoulaye Wade ?

En s’attachant les services d’un colistier relativement jeune, Wade tentera d’abord de faire oublier son âge, 85 ans. La manœuvre pourrait également faciliter une réconciliation de la famille libérale. Depuis l’accession de Wade à la magistrature suprême, son parti a connu une véritable saignée avec les départs successifs d’Idrissa Seck, Macky Sall, Cheikh Tidiane Gadio et dernièrement Aminata Tall Sall. La vice-présidence pourrait ainsi échoir à Idrissa Seck, qui se dit « actionnaire majoritaire du PDS », ou Aminata Tall, qui a claqué la porte du parti en dénonçant l’ingratitude de Wade. Lorsque la vice-présidence a été instituée en 2009, les deux noms avaient d’ailleurs souvent été cités pour occuper le poste…

Dans l’opposition, les réactions ne se sont pas fait attendre. Pour Moussa Sarr, porte-parole de la Ligue démocratique (LD), « le président de la République prépare sa succession biologique ». « Il n’en peut plus, il a atteint ses limites. Qui sera vice-président ? Son fils ou ses fils d’emprunt ? », s’interroge-t-il. Hélène Tine, porte-parole de l‘Alliance des forces du progrès (Afp), partage la même opinion. « Il n’osera pas présenter aux Sénégalais un Wade au carré. Aujourd’hui, c’est le vide autour de lui. Je pense qu’il cherche à faire revenir un de ses fils perdus ou en divagation. Mais, prévient-elle, quel que soit le schéma qu’il va prendre, Abdoulaye Wade sera battu. » La présidentielle de 2012 était d’ores et déjà dans toutes les têtes. Si le projet de loi constitutionnelle annoncé hier par le chef de l’Etat en Conseil des ministres devait être adopté par le Parlement, son intérêt n’en sera encore que plus grand.

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