A tous les chibanis


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Chibanis
Chibanis

Philippe Bohelay et Olivier Daubard ont suivi une quinzaine d’ouvriers du bâtiment originaires d’Algérie, dans les rues de Clermont-Ferrand.  » Chibanis  » en est le résultat. Un hommage touchant et nécessaire à ceux qui ne sont jamais retournés chez eux.

Touchant et nécessaire. Voilà les deux mots qui résument l’ouvrage de Philippe Bohelay et Olivier Daubard, Chibanis. Il s’agit d’un hommage, en photos et en mots, aux ouvriers du bâtiment originaires d’Algérie, aujourd’hui retraités, mais résidant toujours en France, autrefois  » pays d’or et d’argent  » auquel seuls les hommes avaient accès. Arrivés lors des Trente Glorieuses, ces hommes ont consacré leur vie au travail dans un pays qui n’était pas le leur. Aujourd’hui, que sont-ils devenus ? Dans leur foyer du centre-ville de Clermont-Ferrand, à quoi pensent-ils ?

La solitude des élus

Ces hommes aux visages fiers, aux regards nobles, considérés comme des élus que les pères algériens gardaient pour leurs filles, se rappellent d’une même voix qu’ils ont travaillé dur pour honorer les leurs. C’est pourquoi ces multiples individualités aux sentiments si proches ont accouché d’un  » Je  » sous la plume de Philippe Bohelay :  » Je ne savais rien de ce métier mais cela ne m’inquiétait pas : je ferai comme lui (mon oncle, ndlr) qui devait être un bon travailleur pour que le patron lui fasse confiance au point d’embaucher sur sa parole un inconnu comme moi.  »

Les vieux, ces chibanis, qui se tiennent droits et immobiles face à l’objectif d’Olivier Daubard, parlent aussi de leurs souffrances, des conditions précaires de logement, de la maladie. Mais surtout de la solitude qui, si elle a évoluée, les a toujours accompagnés. Séparés de leurs familles, presque étrangers à elles, c’est encore seuls qu’ils sont aujourd’hui :  » Je me lève le matin, je prends le café et je marche des journées entières comme cela : je ne regarde rien, je reste avec moi-même, je pense à ma vie « .

Acte de mémoire

 » La France, c’est aussi un peu mon pays, je suis de là-bas et d’ici, pas tout à fait de là-bas et pas tout à fait d’ici « . Partagés entre deux terres, les chibanis sont en exil partout et ont aujourd’hui le sentiment d’être passés à côté de quelque chose. A force d’attendre une reconnaissance sociale qui n’est jamais venue, ils se demandent aujourd’hui pourquoi on parle d’eux. La réponse, évidente, est dans l’ouvrage de Philippe Bohelay et d’Olivier Daubard. Tout pays a besoin de faire un travail de mémoire. Et de réhabiliter ceux qui le méritent.

Commander le livre : Chibanis de Philippe Bohelay et Olivier Daubard, éditions Bleu autour, 2002

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