Français ou pas, tous les soldats ayant servi sous le drapeau tricolore toucheront à partir du 1er janvier 2007 une pension identique. Le président français, Jacques Chirac, a décidé d’abroger la loi dite de « cristallisation ». Le Conseil des ministres a officialisé mercredi 27 septembre cette mesure pour laquelle 400 millions d’euros seront débloqués.
Par Joan Tilouine
« Nous le devions à ces hommes, qui ont payé le prix du sang, et à leurs enfants et petits-enfants dont beaucoup sont Français. C’était une question de solidarité, de justice, de reconnaissance. Cette mesure juste, est aussi une façon pour la France de réintégrer pleinement cette mémoire dans l’histoire nationale», a souligné Jacques Chirac, à l’issue du conseil des ministres. Cela faisait cinquante ans que les combattants des ex-colonies françaises attendaient cela sans plus trop y croire. Il aura fallu de la patience et la sortie du film « Indigènes » pour que le gouvernement français se résigne à corriger cette avanie.
Plus de 80000 vétérans, répartis dans 23 pays (Béninois, Tchadiens, Burkinabés, Ivoiriens, Sénégalais, Maliens, maghrébins…) sont concernés par cette revalorisation des pensions. « Ils percevront exactement en euros ce que perçoivent les nationaux français», a annoncé le ministre délégué aux anciens combattants, Hamlaoui Mékachéra, qui ajoute cependant qu’il n’y aura pas de rattrapage sur les 47 années d’inégalité. Près de 400 millions d’euros seront débloqués par la France dès le 1er janvier 2007 pour assumer cette homogénéisation des pensions qui coûtera annuellement 110 millions d’euros à l’Etat français.
Mieux vaut tard que jamais
Pensions misérables pour un combat semblable. Pendant quarante-cinq ans, le dossier n’a été traité par personne et était tombé dans les oubliettes. Depuis 1959 un « Tirailleur sénégalais » touche, dans le meilleur des cas, deux à trois fois moins que son compagnon d’armes français. C’est le gouvernement Raffarin qui avait exhumé ce chapitre post-colonial en révélant les injustices entre les traitements des anciens combattants. Le gouvernement actuel, dont M. de Villepin est le premier ministre, conclut le chapitre en réformant, dans le sens de l’égalité et de l’équité, une loi datant de 1959, mise en place par le Général de Gaulle.
Dans le meilleur des cas, les vétérans des anciennes colonies n’empochaient que 30% des sommes versées à leurs frères d’armes franco-français. Alors que les anciens combattants français touchaient 460 euros par an pour avoir servi sous le drapeau, l’algérien n’avait le droit qu’à 100 euros par an contre 66 euros pour le tunisien. Sous prétexte de s’aligner sur le pouvoir d’achat des anciennes colonies, la France a longtemps négligé ses anciens combattants « indigènes ». Il était grand temps que la page se tourne.