Mission accomplie à Paris pour la délégation malgache conduite par le Premier ministre Jacques Sylla. La communauté internationale a offert vendredi son soutien au programme économique et social du nouveau gouvernement du président de Marc Ravalomanana, en accordant à la Grande Ile la somme de 2,3 milliards de dollars sur quatre ans.
Venu à Paris pour plaider la cause de son pays auprès des bailleurs de fonds de Madagascar, le Premier ministre Jacques Sylla a la mine toute réjouie. Il a obtenu ce qu’il est venu chercher : une aide de 2,3 milliards de dollars pour redresser l’économie de la Grande Ile. L’avocat Malgache n’a pas caché sa satisfaction, vendredi, lors de la conférence presse donnée au Centre d’accueil de la presse étrangère (CAPE) à Paris.
Quel bilan faites-vous à l’issue de la réunion de ce vendredi avec les » amis » bailleurs de fonds de Madagascar ?
Jacques Sylla : Je suis satisfait, très satisfait de cette rencontre organisée par la Banque Mondiale, la Commission européenne et le Programme des nations unies pour le développement (PNUD). Nous sommes venus présentés à nos amis le programme de reconstruction économique et social de Madagascar. Celui-ci se base sur trois principaux axes : l’aide d’urgence en faveur des couches les plus pauvres du pays, la bonne gouvernance et l’Etat de droit, avec l’organisation des élections législatives anticipées. Enfin la promotion du secteur privé, avec une redynamisation du marché du travail et la réhabilitation des infrastructures détruites. Ce programme a été approuvé à la quasi unanimité. Il nous sera accordé une somme de 2,3 milliards de dollars, dont un milliard à titre de don.
A quoi sera consacrée en priorité cette enveloppe de 2,3 milliards de dollars ?
Jacques Sylla : A la réhabilitation des infrastructures routières pour désenclaver certaines régions du pays qui ont été touchées lors du bras de fer qui nous opposait à l’ancien régime de l’Amiral Ratsiraka. Vous n’êtes pas sans ignorer que l’Amiral et ses hommes, pour se maintenir au pouvoir ont organisé le blocus de plusieurs régions en dynamitant les ponts, endommageant les grands axes routiers. La seconde priorité est l’amélioration des conditions de vie des populations durement touchées par les émeutes qui ont suivi l’élection présidentielle.
L’augmentation des salaires des ministres annoncée par le président Ravalomanana peut paraître étonnante quand on sait que Madagascar est à la recherche des aides…
Jacques Sylla : Le président Ravalomanana a annoncé cette décision dans le cadre de la lutte contre la corruption. Il faut savoir que chez nous le salaire des ministres se situe aux alentours de 1500 francs (environ 230 euros). Comment voulez-vous qu’il n’y ait pas de la tentation de la part des ministres ? Par cette annonce, le président Ravalomanana, qui est un homme d’affaires, veut passer un contrat d’efficacité avec ses ministres. En substance son message est le suivant : » Je vous donne les moyens de vivre et en contrepartie, vous faites votre travail rien, que votre travail. En cas de soupçon de corruption, c’est la justice qui s’en chargera. »
Avez-vous l’intention de poursuivre, voire de demander l’extradition de l’ex-président Ratsiraka qui se trouve en ce moment en France ?
: Le gouvernement actuel voudrait briser le cercle de l’impunité. Le dossier Ratsiraka est entre les mains de la justice. Si elle démontre que l’ex-président a commis des actes délictueux, l’exécutif mettra tout en marche pour qu’il soit jugé. Nous demanderons son extradition, s’il le faut.
La presse malgache a accusé le gouvernement algérien d’avoir apporté une aide matérielle à l’ancien président. Comment envisagez-vous vos relations avec ce pays ?
Jacques Sylla : Je pense qu’il y a eu des incompréhensions entre nous. Je dois préciser que nous n’avons jamais appréhendé d’Algériens en flagrant délit de sabotage dans notre pays. Par contre, nos services ont mis la main sur un avion algérien transportant du matériel de télévision appartenant à un allié de l’ex-président.
Votre gouvernement est encore en quête d’une reconnaissance internationale. Comment comptez-vous faire pour légitimer votre prise de pouvoir ?
Jacques Sylla : Chez nous, la ligne droite n’est pas le plus court chemin d’un point à un autre. Madagascar a certaines spécificités. Nous sommes une île dans l’Océan Indien et beaucoup de pays africains croient que la crise que nous venons de vivre est d’origine ethnique. Elle n’a jamais été ethnique. Certains de nos pairs africains commencent à comprendre que le principal enjeu de cette crise est l’alternance du pouvoir. Ils nous conseillent de prendre patience. C’est ce que nous faisons.