Arabika est le petit dernier de la presse magazine française. Mais avec sa mise en page soignée et ses sujets abordés avec profondeur, il a déjà tout d’un grand. Rencontre avec ses créateurs, Djazir Abella et Hadi Chmait.
Une couverture qui attire l’oeil, une mise en page sobre et inventive à la fois, des photos soignées. Arabika est un beau et bon magazine qui souhaite donner à la culture arabe un lieu d’expression à sa hauteur. Le rédacteur en chef, Djazir Abella, et son adjoint, Hadi Chmait, ont 54 ans à eux deux et font déjà tourner deux autres titres. Le premier numéro d’Arabika, sorti en juin dernier et tiré à 45 000 exemplaires, a su plaire aux professionnels comme aux lecteurs. On souhaite encore plus de succès au deuxième numéro, qui sort en France le 5 septembre.
Afrik : Comment est né le concept d’Arabika ?
Djazir Abella : L’idée de réfléchir à un magazine de ce type était dans nos têtes depuis un moment. On a eu le déclic pendant une fête de fin de Ramadan au Cabaret sauvage (salle de spectacles parisienne, ndlr) où il y avait plein d’artistes de styles musicaux différents. On a décidé de concevoir un magazine montrant la diversité et la richesse de la culture arabe.
Hadi Chmait : Il y a un manque en la matière dans les kiosques. Djazir est d’origine algérienne, moi d’origine libanaise. On fait partie de la 3ème génération d’arabes vivant en France et personnellement, il n’y a aucun magazine qui me touche directement.
Djazir Abella : C’est vrai qu’en France, il y a un vrai manque d’informations sur la communauté arabe. Des publications existent mais elles sont surtout politiques ou économiques. Nous, nous avons axé notre magazine sur le côté vivant d’une culture.
Afrik : Le nom du magazine sonne comme un défi…
Djazir Abella : Il fallait un nom fort pour un concept fort ! On voulait un nom qui marque, qui fasse mal quand on le lit ! C’est un nom qui peut choquer certains, notamment les populations berbères en conflit avec l’arabité comme en Algérie, mais il suffit d’ouvrir Arabika pour se rendre compte que nous parlons de tous. Dans le premier numéro, il y a une longue interview de Djura et un hommage à Matoub Lounès par exemple…
Afrik : Quels sont vos lecteurs ?
Djazir Abella : Nous avons ciblé les 25-35 ans, d’origine arabe, maghrébine et orientale. Mais nous avons découvert, grâce à un questionnaire inséré dans le premier numéro, que nous n’avions pas que des lecteurs d’origine arabe. C’était l’un des buts d’Arabika : s’ouvrir au-delà du monde arabe et faire découvrir cette culture à tout le monde.
Hadi Chmait : Nous ciblons le Sud de la France, qui compte une forte population arabe, et nous espérons toucher un public encore plus large en diffusant à partir de la fin du mois de septembre dans les pays francophones (Suisse, Belgique, Canada) ainsi qu’au Maroc, Tunisie et Algérie. Nous ne restons pas focalisés sur la France : le deuxième numéro contient des reportages à Alger et au Liban.
Afrik : D’où viennent vos financements ?
Djazir Abella : Nous ne recevons pas de financements extérieurs. En terme de liberté d’expression, il est plus intéressant pour nous de nous auto-financer. C’est Arcadia, une jeune structure de trois ans, qui gère nos trois magazines : Track List, sorti en juin 2001 (magazine sur le monde hip-hop et la musique rap, ndlr) et BPM (spécialisé dans la musique électronique, ndlr), créé en même temps qu’Arabika, en juin 2002. Comme on a plusieurs publications, on commence à se faire connaître dans les grosses agences de pub.
Afrik : Que pensez-vous de l’Année de l’Algérie prévue en France en 2003 ?
Djazir Abella : C’est une très bonne chose, c’est très positif. Nous allons faire un dossier spécial dans chaque numéro pour informer nos lecteurs des différentes manifestations.
Afrik : A quand Arabika sur Internet ?
Djazir Abella : Le site d’Arabika sera en ligne début octobre. Nous allons nous en servir pour donner une info en continue, ce qui nous est impossible avec un magazine qui sort tous les deux mois pour le moment, notamment en ce qui concerne l’agenda et l’actualité des artistes.