Le Président de la République française a instauré le 10 mai pour commémorer l’esclavage et la Traite négrière. Que représente aujourd’hui cette date pour l’Homme de la rue ? Micro-trottoir à Paris.
Par Mame Diarra Diop
Micheline Calif, 57 ans, Attaché de direction, d’origine antillaise
« C’est une date qui vient un peu tard »
« Je suis tout à fait favorable à une telle commémoration qui me semblait indispensable depuis longtemps. C’est un pas, une reconnaissance. Elle aidera celui qui ne connaissait pas ce pan de l’Histoire, un peu passé aux oubliettes, à en savoir plus et à s’éclairer davantage sur l’esclavage. Et les historiens feront peut être un meilleur travail de vulgarisation de leur savoir. En ce sens, c’est très positif. Je participerai justement à cette commémoration qui sera inaugurée par le Président de la République au Jardin du Luxembourg, car j’ai une amie artiste, Léa de St Julien, qui y expose. Elle a fait une installation monumentale de photos dans l’allée St Michel. »
Nathalie Sebon, 38ans, Assistante de direction, française
« Il y aura une prise de conscience des français »
« Une telle date arrive tard, et l’esclavage aurait dû être reconnu comme crime contre l’humanité bien avant. J’apprécie beaucoup l’œuvre de Christiane Taubira qui a réussi à mener à bien sa revendication et j’espère qu’on en parlera un peu plus dans les médias dorénavant. Avec la date du 10 mai, il y aura une prise de conscience des Français, même si cela risque d’être très long et très difficile. Et je pense que c’est la communauté africaine qui va convaincre le plus de Français que cette expérience de 400 ans a été un véritable crime contre l’humanité. »
Jimmy Foly, 34 ans, Téléenquêteur, d’origine togolaise
« C’est un évènement pour la communauté noire »
« C’est une grande chose pour tous les Africains, ceux de la diaspora, tous les Antillais et même les Européens. Qu’ils sachent tous qu’ils sont passés par le noir, que la déesse mère est noire. Il faut que la vérité soit dite et que les esprits se libèrent. Et que les gens puissent aller de l’avant. On a donné une date, mais c’est tous les jours que les gens vivent la souffrance dans leur esprit. »
Ibrahim Diallo, 28 ans, sans emploi, d’origine ivoirienne
« Il faut que cette date s’applique vraiment comme un jour férié »
« C’est bien d’avoir une date, mais je demande si cela va changer quelque chose ? Est-elle vraiment importante dans le cœur des gens ? C’est la question que je me pose. Il faut que cette date s’applique vraiment comme un jour férié. »
Kader Ouedraogo, 28 ans, étudiant en Comptabilité, d’origine burkinabé
« Le combat est encore long »
« C’est une reconnaissance de la France des effets de l’esclavage, même si le combat est encore long. Il reste beaucoup à faire, mais il faut continuer la lutte. Avant, il n’y avait rien et aujourd’hui, on a une date. Peut être que d’ici cinq à dix ans, il y aura des monuments dans chaque pays africain, d’autres symboles… »
Anne Yoro, artiste peintre, franco-ivoirienne
« Il n’ y a pas assez de manifestations sérieuses pour marquer le coup »
« Instaurer une date pour commémorer l’esclavage est à mon avis une chose très positive. Malheureusement, je trouve qu’il n’ y a pas assez de manifestations sérieuses pour marquer le coup. Ce 10 Mai n’est pas bien organisé par la communauté. En ce qui me concerne, je vais aller faire une marche qui part de République vers 14h. Il faut que les gens se mobilisent ! ».
Thierry Ducteil, 34 ans, conseiller clientèle, d’origine antillaise
« Il faut cesser ce complexe des victimes perpétuelles dans nos actes et dans nos têtes »
« 26 avril, 10 mai, 22 mai, 23 mai : beaucoup de dates, beaucoup de faits, il est bien difficile de savoir qui a commencé le combat et quand. Une chose est sûre, c’est qu’il n’est pas fini !!! Il faut cesser ce complexe des victimes perpétuelles dans nos actes et dans nos têtes. Il faut continuer le combat de Schoelcher, Toussaint Louverture… et de tous les anonymes qui ont donné leur vie pour sauver les notres. Et transmettre la flamme fragile de la connaissance au plus grand nombre pour que jamais elle ne s’éteigne… »