La fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a accusé, mardi, l’armée malienne d’avoir commis « une série d’exécutions sommaires » dans l’Ouest et le Centre du Mali, notamment à Sévaré où pas moins de onze personnes auraient été exécutées. Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian a mis en garde les troupes françaises et maliennes. « Il faut être extrêmement vigilant », a-t-il prévenu déclarant qu' »Il y a des risques » que les populations arabes et touaregs soient visées. Michel Galy, politologue et sociologue spécialiste du Mali, craint d’autres exécutions sommaires. Interview.
Afrik.com : Les organisations de défense des droits humains accusent l’armée malienne de perpétrer des exactions contre la population civile dans l’Ouest et le Centre du Mali. C’est vrai ou faux ?
Michel Galy : Oui, c’est d’autant plus vrai que les observateurs dont émanent ces accusations sont indépendants. Entre Touaregs et les Arabes, d’un côté, et l’armée malienne de l’autre, il y a une haine réciproque autour des rivalités successives comme en 1963. Une rivalité qui s’exprime en termes très durs tels que : « peau rouge » ou « peau blanche ». Des qualificatifs négatifs pour identifier les Touaregs et les Arabes.
Afrik.com : Pourquoi autant de haine ?
Michel Galy : Dans le Sud du Mali, à Bamako même, les Touaregs sont presque aussi détestés que les islamistes. La population les accuse de tout : du renversement de l’ancien président Amadou Toumani Touré (ATT), à la prise du Nord-Mali, jusqu’à l’installation des islamistes sur ce territoire. Dans le Nord-Mali, il y a des milices civiles, comme Ganda Koy, qui exterminent des combattants Touaregs du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et même des civiles. Pour l’instant, ils sont désarmés mais ils demandent des armes à l’armée malienne.
Afrik.com : Qu’est-ce qui est à déplorer ?
Michel Galy : Ce qui se passe, en ce moment, ce n’est rien à ce qui pourrait se passer à Gao, Tombouctou et Kidal, si la France ferme les yeux. L’armée malienne pourrait y commettre d’autres exactions. Ce qui s’est déjà produit à plusieurs reprises, dans l’Ouest et le Centre du Mali, comme le fustigent les organisations des droits humains. C’est quasi impossible pour l’armée malienne d’affronter les Touaregs du MNLA et de combattre en même temps les islamistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Donc, ils s’en prennent à la population. On annonce l’arrivée de l’armée tchadienne et des armées de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) directement au Nord-Mali. Ces armées, notamment celles du Tchad et du Nigeria, sont coutumières de ce genre d’exécution.