Face aux tensions croissantes en Afrique du Nord, Emmanuel Macron déploie une stratégie diplomatique audacieuse. En jouant la carte de la réconciliation mémorielle avec l’Algérie tout en maintenant ses liens avec le Maroc, le président français tente un exercice d’équilibriste périlleux.
Emmanuel Macron, fidèle à son approche pragmatique mais changeante des relations internationales, tente de redéfinir la diplomatie française en Afrique du Nord. Après avoir reconnu, sans le soutien de son Parlement, la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, un geste qui a rapproché Paris de Rabat mais tendu les relations avec Alger, le président français se tourne à présent vers l’Algérie dans une tentative de relancer le dialogue. Au cœur de cette démarche : la réconciliation mémorielle, un chantier qu’il espère voir aboutir pour faciliter la visite d’Abdelmadjid Tebboune, récemment réélu à la tête de l’Algérie.
Poursuivre le travail de mémoire : un message à l’Algérie
Dimanche, l’Élysée a réaffirmé la détermination de Macron à « poursuivre le travail de mémoire, de vérité et de réconciliation » avec l’Algérie, un effort essentiel pour apaiser des tensions historiques qui pèsent sur les relations bilatérales. Lors d’une réunion à l’Élysée avec des historiens, le président français a exprimé le souhait que les propositions formulées par la commission mixte franco-algérienne, créée en 2022, soient rapidement mises en œuvre. Cette commission, constituée pour faire la lumière sur les événements de la colonisation française en Algérie, a déjà travaillé sur la restitution de biens culturels et l’ouverture des archives coloniales.
Le positionnement de la France sur la question du Sahara occidental est aujourd’hui une source de tensions profondes avec l’Algérie. Alors que cette dernière soutient de longue date le Front Polisario, mouvement indépendantiste revendiquant l’autodétermination de ce territoire, la décision de Paris de soutenir ouvertement les revendications marocaines a provoqué un véritable froid diplomatique.
Dans ce contexte, la réaffirmation de Macron en faveur de la réconciliation mémorielle peut être perçue comme une tentative de renouer le dialogue avec Alger. Les efforts pour faciliter la venue de Tebboune en France, prévue à l’automne 2024 mais régulièrement reportée, s’inscriraient alors dans cette dynamique.
Un retour subtil à la position onusienne sur le Sahara occidental ?
En se réengageant sur le terrain de la mémoire avec l’Algérie, Macron pourrait préparer un terrain plus favorable à une évolution de la position française, permettant de rétablir un équilibre entre Rabat et Alger.
La réconciliation mémorielle pourrait donc servir de pont pour renouer des relations apaisées, tout en laissant entrevoir une ouverture vers un retour à la diplomatie onusienne concernant le Sahara occidental. Ce possible rééquilibrage serait alors vu comme une réponse aux critiques algériennes sur l’évolution récente de la politique française, et un geste envers Tebboune, dans un contexte de tensions régionales accrues par l’incertitude qui plane sur le Maroc en raison de l’état de santé précaire de Mohammed VI.