Le terme « vaudou » ou « vodoun » désigne au Bénin un esprit et son image. Par extension, il s’applique aux rites de possession pratiqués en Haïti par les descendants des esclaves noirs originaires d’Afrique. A quoi correspond aujourd’hui cette religion? Quelles sont ses croyances et ses mécanismes? Reportage en Haïti.
Qu’ils soient asiatiques, africains ou afroaméricains, ces rites adoptent une même configuration : des vivants anthropomorphes investissent le corps d’un humain lors d’une transe qui a lieu au cours d’une cérémonie. Le possédé, ou medium, qu’on appelle « le cheval de Dieu » adopte un langage et un comportement qui sont propres a l’entité qu’il a incorporée et lorsqu’il reprend conscience, « il perd tout souvenir de sa possession », nous explique Max Beauvoir, le Maître suprême du Vaudou en Haïti.
Le vaudou est une véritable religion avec ses prêtres, les hougans , ses prêtresses, les mambo, ses sanctuaires ou houmfo, ses outils et ses panthéons de divinités. Ces êtres surnaturels sont appelés « LOAS ». Les esprits forment deux groupes. Les loas rada et petro. Chacun d’eux possède son rythme tambouriné.
Les loas rada sont les plus doux, les plus civilisés, alors que les loas petro sont les plus forts, mais aussi les plus féroces.
En Haïti les adeptes du Vaudou respectent toujours les loas petro, incarnés par Ti-Jean qui est une puissance féroce. Parmi les loas les plus importants : Legba, Damballah, Ogoun, Erzilli. Et chaque loa a son jour et sa propre nourriture.
Legba est celui qui ouvre les portes, les barrières, maître des carrefours et protecteur des seuils. Il est représenté par un vieillard loqueteux, pipe à la bouche, sac en cuir, et marchant avec difficulté à l’aide d’une béquille. Son jour est le mardi et sa nourriture est du riz collé au pois noirs. Sa boisson est clairin et sirop.
Damballah, dieu du serpent, accompagné de sa femme, est le maître de l’argent qui découvre les trésors : sa couleur est le blanc, donc sa nourriture se compose de riz blanc, lait, œuf ,sirop de miel, gateaux. Sa boisson Whisky écossais, sirop d’orgeat et son parfum florida.
Ogoun ferraille est un guerrier vêtu en rouge avec une épée et il monte un cheval blanc. Ses jours sont le mercredi et le samedi, sa nourriture le poisson rouge, ou rose, avec du riz aux pois rouges, les fruits de mer. Il utilise comme boisson le rhum et se sert dune machette.
Erzilli, lui, incarne la beauté, la coquetterie, la sensualité. Il se présente sous les espèces d’Erzilla dantor et d’Erzilla freda. Les Haïtiens préfèrent l’avatar d’Erzilli qui se présente comme la déesse noire qui aime les parfums, les hommes, les bijoux… Elle aime le riz collé, la banane et le tia maria, l’amaretto, le Grand Margnier, le Cinzano, etc.
Les « guedes » ont aussi une grande importance dans la culture des Haïtiens. Ces loas font allusion aux morts et sont personnifiés par Baron samedi, Baron Lacroix, Baron cimetière et Mama Brigitte. A chaque premier novembre un grand nombre d’Haïtiens se rendent dans les cimetières pour parler aux défunts.
Le grand maitre du vaudou
En Haïti, quand on parle de « vaudou » on se doit de citer le maître suprême du vaudou Haïtien, Maître François Max Gesner Beauvoir, qui dans sa déclaration lors de son ordination comme chef suprême du vaudou a notamment declaré : « Nous devons construire Haïti pour le bonheur de tous les Haïtiens. La force de travail du vaudouisant est extraordinaire mais on ne le reconnait pas en Haïti même si la constitution haïtienne, adoptée le 4 avril 2003, reconnait le vaudou comme religion à part entière ».
Et pourtant le Vaudou a été longtemps victime de l’incompréhension, de l’ignorance des une et des autres… Tout récemment, après le tremblement de terre de 2011, plusieurs maitres vaudous ont été attaqués voire assassinés par des Haïtiens qui les accusaient d’être la cause de ce séisme terrible. Faute d’explication à ce phénomène naturel, des esprits faibles accusaient les prêtres vaudouisants de disposer de pouvoirs suffisants pour provoquer un tremblement de terre.
Face à de telles accusations, Max Beauvoir a justement consacré une bonne partie de sa vie à faire sortir le vaudou, comme religion, de son ancienne marginalisation et de sa stigmatisation… Comme toute pratique collective secrète, la Vaudou suscite en effet de grandes hostilités : à toutes les époques, certains voulurent détruire, éradiquer et même faire disparaître et effacer une telle religion. Notamment en accusant le vaudou d’appartenir au monde de la sorcellerie …
Où en sommes-nous désormais ? Le Vaudou n’a probablement jamais été aussi largement pratiqué qu’aujourd’hui à Haïti !