Annie Flore Batchiellilys, chanteuse gabonaise, est une figure emblématique de la scène live dans son pays. Elle puise dans la richesse culturelle du Gabon pour créer une musique moderne et ouverte au monde. Elle est en concert à Paris, à l’Olympia, le 21 janvier. Elle a accordé une interview à Afrik.com.
Annie Flore Batchiellilys est née à Tchibanga (sud-ouest du Gabon) le 10 avril 1967. Elle a passé son enfance aux côtés de sa grand-mère qui lui a transmis le goût du chant alors qu’elle pensait s’orienter vers la mécanique automobile. Cette femme mariée, mère de trois enfants, est une inlassable combattante de l’authenticité et de la diversité. A quelques jours de son concert à l’Olympia, Annie Flore Batchiellilys a voulu se prêter à nos questions.
Afrik.com : Vous allez monter bientôt sur le podium de cette salle mythique qu’est l’Olympia, réaliser le rêve de la plupart des chanteurs africains, quel sentiment avez-vous à l’orée de cet événement ?
Annie Flore Batchiellilys : Pour moi, l’Olympia est surtout un cri. Dans notre milieu professionnel et partout ailleurs, on constate malheureusement que la différence et la diversité n’ont plus de place. Au Gabon, on a coutume de dire que si tu n’as pas un parent riche, toutes les portes te seront verrouillées. J’ai envie de montrer que tout est possible à condition de croire en ce qu’on fait et de se mettre ensemble avec les autres. L’unité est une force et la volonté transporte à des hauteurs sublimes. Comme je l’ai souvent dit dans mes chansons, la diversité est une chance. Je vais à l’Olympia pour partager ma différence, ma culture, mon pays et surtout mes rencontres. Je veux que les gens viennent découvrir ce que nous sommes, l’Olympia sera un grand moment de partage.
Afrik.com : Avez-vous reçu des soutiens pour la préparation de ce concert ?
Annie Flore Batchiellilys : Oui, énormément. J’ai reçu beaucoup d’aide. Les choses ne sont pas toujours faciles mais la foi est extraordinaire. Dieu met toujours sur notre chemin des gens pour nous soutenir, des gens qui croient en nos rêves. Il est difficile de se réaliser seul. Un grand merci à tous ceux qui m’apportent le souffle pour continuer ma carrière.
Afrik.com : Vous parlez du partage et du don à l’occasion de ce concert, peut-on savoir ce que vous avez dans votre panier pour le public qui viendra vous découvrir ?
Annie Flore Batchiellilys : Dans mon panier, il y a d’ abord mon essentiel, ma culture, mon pays. J’irai en Vert-Jaune-Bleu. Ensuite j’ai une équipe cosmopolite qui travaille avec moi depuis plus de dix ans, nous irons ensemble montrer aux yeux du monde que la diversité et la différence sont de grandes richesses.
Afrik.com : Dans tous vos albums vous chantez la nature, qu’est-ce qui explique cette reprise constante de ce thème ?
Annie Flore Batchiellilys : J’ai eu le privilège de naître et de grandir dans la brousse. La forêt est notre toit, notre médicament, notre héritage et nous devons la protéger pour notre bien et celui de nos enfants. La nouvelle civilisation veut nous éloigner du mode de vie de nos ancêtres mais c’est dommage. Il ya beaucoup de souffrance dans les villes. L’Homme doit devenir plus responsable vis à vis de la nature. En tant qu’Africain, c’est notre bien le plus précieux. Les populations rurales dépendent totalement de la nature pour se nourrir et se soigner voir pour leurs logements. Je pense que le combat pour la protection de la nature doit devenir la bataille de tous les Africains qui aiment leurs peuples. Le réchauffement climatique qui fait l’actualité depuis quelques années est symptomatique des catastrophes à venir si nous ne faisons rien pour améliorer notre comportement envers la mère nature.
Afrik.com : En dehors du thème de la nature, quels sont les autres thèmes récurrents présents dans vos chansons ?
Annie Flore Batchiellilys : Je chante la vie, l’amour et le concret. Je veux être réaliste. Je m’inspire de la vie et de mes émotions. La nature est un grand livre, je l’observe et je chante, et le chant, c’est mon champ.
Afrik.com : Pouvez-vous nous parler de vos débuts dans la musique…
Annie Flore Batchiellilys : J’ai commencé en 1988 en participant à un concours télévisé appelé « Bonsoir musique ». La même année j’ai suivi des cours de musique au « Carrefour des Arts » créé par Pierre Akendengue , au centre culturel français de Libreville. En 1990, je suis partie en France pour suivre des cours de chant, apprendre le solfège et la tenue sur scène. Mon premier album intitulé Afrique mon toit est sorti en 1997. Je saute comme la gazelle, à ce jour je compte trois albums et un single.
Afrik.com : Avez-vous quelques projets ?
Annie Flore Batchiellilys : Je dois organiser le festival des Nuits atypiques de Mighoma dans mon village cette année également. Ce festival a pour but de valoriser la vie rurale. Mon prochain album intitulé Le chant c’est mon champ doit bientôt voir le jour. Après l’Olympia, je ferai le tour du Gabon avec des concerts gratuits dans les villes et surtout les villages. J’ai envie de chanter et de danser en pleine forêt avec les vieux et les jeunes du monde rural.
Afrik.com : Le mot de la fin ?
Annie Flore Batchiellilys : Une pensée de paix à un membre de notre équipe, Alino, qui nous a quitté cette année pour les mondes supérieurs. Plus le temps passe, plus il nous manque. Je pense aussi à tous ces bras qui m’ont soutenu et qui me soutiennent encore et sans lesquels je ne serais rien. La musique est l’âme d’un peuple et le chant est ma pierre d’angle que j’apporte au vaste chantier de construction d’un monde de paix, uni et solidaire dans la diversité.